A Venise depuis hier après-midi, plus précisément à Punta-Sabbionni, face à l’Adriatique, où Aplo et moi avons pris location d’un bungalow dans un camping avec les 70 autres participants au stage de combat. D’ailleurs, n’était-ce un soleil magnifique et la connaissance de la situation, l’organisation au cordeau des parcelles, allées, rues, magasins, kiosques, attraction et mini-golfs, espace encore peu fréquenté en cette saison et cependant arpenté de jour comme de nuit par des gardes en uniforme rouge, aurait du mal à nous persuader que nous ne sommes pas les hôtes d’une cité expérimentale conçue par des experts en ingénierie politique. Idée perverse, que je dois être le seul à avoir à en juger par le plaisir que prennent les couples allemands a bronzer leurs jambes devant des tentes de luxe au milieu des herbages que douchent des jets automatiques. Grand bien leur fasse, car l’été le camping peut recevoir jusqu’à treize mille clients. Pour ce qui est des prouesse physiques, nous voici dès huit heures le matin sur la plage, une étendue de sable de plus de trente kilomètres, pour deux heures d’entraînement, puis deux heures encore dans l’après-midi. Entre temps, nous mangeons, nous dormons, nous commentons les exercices.
Mois : avril 2015
Carrefour
Monfrère vient de finir sa course à travers la Castille de Soria à Tudela. Cent-vingt kilomètres en trois jours. Ce soir, il envoie un message de Madrid: Français en grève, avion annulé. Or, nous avons rendez-vous le lendemain matin à l’aéroport de Genève où je dois lui remettre son fils. Message suivant: il annonce avoir acheté deux autre billets pour Genève à la compagnie Swiss. Accompagné de ma mère, il se rend à l’aéroport de Madrid. Les autres passagers ont déjà embarqué. Ma mère se dévoue, convainc l’hôtesse de terre de les faire monter à bord. Celle-ci fait remarquer que ni elle ni Monfrère ne sont porteurs de cartes d’embarquement. Monfrère s’excuse, il a oublié des les imprimer. L’hôtesse finit pas céder. Mais au moment de les diriger vers l’appareil, la tour de contrôle refuse le droit de décoller. Les passagers reviennent dans les bâtiments d’aéroport. Monfrère et ma mère sont alors dirigés vers un hôtel où ils dorment. A minuit, autre message. Mon père, cette fois. Il était prévu qu’il s’installerait avec sa femme demain matin dans l’appartement que j’occupe à Torrevieja, Or, il annonce que son vol Genève-Madrid vient d’être annulé. J’essaie de dormir, car il me faut réveiller les enfants à 5h00 pour rejoindre l’aéroport d’Alicante en bus. Un autre message me réveille. Mon père et sa femme viennent d’atterrir à Madrid, ils feront route le lendemain sur Torrevieja à bord d’une voiture de location et me prient d’avertir la propriétaire de l’appartement. Sur ce, mon père me conseille de m’assurer que notre vol Alicante-Genève n’est pas annulé. Je fais un message à mon frère qui répond: s’il est annulé, la compagnie t’avertit par l’envoi d’une message. Je me rendors. Et me réveille. Nous prenons le bus. Nous prenons l’avion. Nous empruntons un autre couloir aérien, par le sud, volons au-dessus de Nice, remontons les Alpes. A l’aéroport de Genève, pas de nouvelles de Monfrère. Pourtant, son dernier message qui date de 9h00 m’annonçait qu’il décollait de Madrid. Il est 11h30. Attendre m’est difficile, car dimanche matin, soit dans moins de vingt-quatre heures, je pars pour Venise en voiture avec Aplo où nous sommes attendus pour un camp de boxe. En gare de Cointrin, je monte à bord d’un train pour Fribourg avec Luv, Aplo et mon neveu après m’être assuré qu’il y a quelqu’un à mon bureau de Genève. Mon neveu y attendra son père. Une minute avant que le train ne ferme ses portes, le téléphone sonne: Monfrère et ma mère viennent d’atterrir. Aplo saisit la valise de mon neveu, la descend sur le quai, le train s’ébranle, il marche en direction de l’aéroport. Quatre heures plus tard, à Fribourg, tandis que je rassemble shorts, protections, gants de boxe, cordes à sauter, baskets et démonte les vélos pour les remiser dans le coffre de la voiture, un message de mon père dit: “je viens d ‘arriver à Torrevieja, l’appartement est très bien.”
Banalité
Dire ce que l’on fait. Se raconter. Sans autre ajout d’idée, sans jugement. Une simple énumération de faits. Imaginons que j’adopte le point de vue extérieur pour tenter de répondre en tout franchise à la question: que fais-je? J’écris deux ou trois livres par année, je me promène dans le monde en touriste, je fais du sport. Voilà pour l’essentiel. Ainsi présentée, la chose est simple. Trois activités, l’écriture, le sport, le tourisme qui relèvent du passe-temps. Tel est donc mon emploi du quotidien. Mais il faut préciser qu’il n’y a d’existence que considérée de l’intérieur. Extérieurement banale et descriptible en quelques mots, chaque activité est accompagné d’une résonance sans laquelle elle ne saurait être mesurée à sa juste valeur. Les répercussions intérieures de ces traversées touristiques du monde par exemple: elles sont innombrables. L’art en général peut donc être considéré comme un tentative d’exposer l’intérieur de l’homme.
Tempête
Après les températures clémentes du lundi de Pâques, une tempête lève en méditerranée interrompant le trafic des bateaux. Sur le quai visible depuis le balcon retombent les écumes des vagues qui fouettent les digues. Les enfants jouent sur les blocs de pierre et reviennent détrempés tandis que les badauds, pinçant leurs cols entre deux doigts, observent inquiets les mouvements gris de l’eau.
Euro-Kinesia
Rue Fuensanta, des Russes tiennent un club de sport réparti sur deux étages, chacun pourvu des mêmes machines. L’un est réservé à la rééducation, l’autre à l’entraînement. Ainsi, les amochés qui fréquentent le premier étage ne sont pas découragés à la vue des athlètes et ces derniers ne sont pas freinés dans leur exercices à la vue des accidents dont ils sont menacés.
Torrevieja
Torrevieja, en ce week-end pascal, quelque peu moins léthargique que l’année précédente. Des boutiques ont ouvert, des bars aussi; mauvais signe cependant, la jeunesse se bouscule pour dîner de pizzas dans des emballages carton, une habitude que les Espagnols, à la différence des Nordiques, n’avaient jusqu’ici pas contractée. Nos promenades rituelles nous mènent sur le quai, le long des échoppes du marché artisanale où des Africains vendent de la camelote importée d’Asie, au parc d’attraction installé contre la Marina, puis dans le centre pour manger des glaces. Le moment le plus agréable de la journée demeurant le repas de l’après-midi dans l’un des restaurants du quartier, le Galicien, la sidrerie, mais surtout El Rincon de Andres où une famille de quatre personnes tient tous les rôles comme l’établit la photographie accrochée au-dessus du bar: Andrès, le chef, Conchita, la cuisinière, la fille et le garçon, seize et dix-huit ans, responsables de la terrasse et de la salle à manger.
Mondial de football
Cette nuit, ce rêve qui me remet en mémoire un événement datant de l’an 2000 auquel je ne pensais plus: autour d’une table ovale, dix hommes en costumes, de retour de Tokyo, m’adressent leurs doléances quant au mandat que je leur ai confié me reprochant d’avoir sous-estimé le cahier des charges. Je me défends en expliquant que je ne connais rien à la question de la télédiffusion des matchs de football et que je les avais prévenus.
De fait, en prévision du mondial de football organisé conjointement par la Corée et le Japon en 2000, j’avais la tâche de recruter pour une agence internationale de travail intérimaire des techniciens caméra et de les envoyer dans les stades à l’autre bout du monde. En cas d’accomplissement du mandat, la moitié de leur salaire devait me revenir. Et j’allais ainsi, en bus, sur la foi d’une adresse trouvée dans l’annuaire téléphonique, à un premier rendez-vous, dans une société de production du Grand-Saconnex, rencontrer un ingénieur afin de le convaincre de partir pour le japon. Cela va sans dire: je n’ai trouvé personne et n’ai pas gagné un sou.
Torrevieja
A l’aéroport d’Alicante avec les trois enfants, un peu sonné après une nuit d’un mauvais sommeil. Puis une heure plus tard, à Torrevieja, rue Ulpiano, où nous attend Conchita. Nous prenons possession de l’appartement, nous saluons les voisins, nous posons nos chaises sur la plage, il fait beau.