Quand vous naviguez sur un grand vaisseau, avion ou navire, vous n’avez aucune influence sur le régime des rythmes, air ou chaufferie. Dans les immeubles suisses, c’est pareil. Boulonnés au paysage, ils vous contiennent et vous imposent leur machinerie. Dans mon immeuble de montagne, je subis une chaleur en chambre digne d’un asile de vieillard alors que mon frigorique est sibérien.
Actions
Pas d’autre résistance que les comportement libres et affirmés. A charge de tous. A charge de chacun. Face à la situation mondiale de fausse urgence et de réelle mainmise, l’infraction systématique est modeste mais elle favorise la re-conquète. Qui eut dit hélas, il y a trois mois encore, que nous aurions à défendre par des actes ponctuels d’oppositon une liberté pratique? Et cependant, elle paraissait déjà bien éloignée de l’idéal philosophique notre liberté. Sauf que: aujourd’hui elle est menacée. Pire, telle que médiatisée par les outils réglementaires et numériques, elle pourrait disparaître sans que l’on en garde le souvenir.
Films
Il y a des soirs où je me persuade de regarder un film. Je cherche. Long temps. Je finis par trouver. Dès les premières scènes, avant même le générique — puisque le régime d’appel fonctionne désormais ainsi — je renonce. Ce soir, je me demandais: pourquoi? Car notre monde est une fiction. Je passe l’essentiel de ma journée à ramener ce qu’on me présente à la réalité afin de construire une situation minimum; de sorte que j’éprouve, à lancer en soirée un film pour le divertissement, un immense gâchis.
9 mm
Dans les bois du Valais, en altitude, le matin, avec des armes. Les mieux doués que moi ont un équipement modeste mais efficace. J’ai un équipement efficace et immodeste. Ce n’est pas faute de vouloir, de tenter, de travailler. J’y consacre hélas un temps marginal et achète parfois ce matériel au titre de l’investissement; quant à mes connaissances pratiques, elles sont maigres. Disons-le, en regard des spécialistes, j’ignore plus que je ne sais. Or, dans ce milieu d’amateurs, l’amateurisme ne pardonne pas. Ainsi, dès que nous prenons place sur le terrain (550 mètres de dévers au-dessus de la broussaille, interdit de trébucher), l’instructeur s’emploie à me rabrouer. Il me renvoie, m’isole, demande à son assistant-tueur de me faire réptéter les régimes de souplesse, “dégainé, contact press-touch”, les intitiés s’y reconnaîtront. Bonne nouvelle, l’homme qui est affecté à mon examen, en dépit de son air de motard viellissant, bandana sur le front, muscle rebondis, pattes, est un personnage: calme, bienveillant, direct — lentement il me remet en place. A la fin de l’entraînement (entre temps j’ai été réintégré dans le groupe), comme nous regagnons par un sentier suspendu nos voitures, il me dit son métier: “tiger”. C’est à dire Marshall embarqué sur les avions de ligne pour assurer la sécurité armée à bord.
Images 2 (erratum)
Je ne concluais pas la note précédente, je m’en aperçois deux jours plus tard. Pour mémoire, omission imputable au fait que je crois le destin des Goebbels bien connu, mon but était ici de mettre en évidence le tragique du jeu des enfants, sur le toboggan, avec le skateboard bricolé, devant la future avancée de l’armée rouge — nous parlons des derniers kilomètres. Magda, pour préserver ses filles de tout régime qui supplanterait le nazisme, les empoisonne.
Images
Dans les documentaires d’époque à usage intérieur filmés par le Reich, réception de Rommel, alors en charge de la consolidation de la ligne de fortification Europe, chez Magda Goebbels, femme du Ministre de la propagande: on y voit l’un des enfants de la famille descendre un toboggan sur un skateboard artisanal.
Mouvement 28
Pluie drue. J’hésite. Gala m’explique un escalier, un potager sauvage, un couvert. Ne trouve pas. Je me retrouve à faire des exercices dans une niche de vieux ciment avec les cloportes et deux araignées fuyantes. L’Espagne est toujours fermée. “Pitié-Espagne”, écrivais-je il y a un mois: je confirme. La génération nouvelle n’a jamais travaillé. Elle est nourrie de télévision et d’omelette. A demi-perdue. Rampante. Et place sa confiance dans cette équipe de grands salauds du gouvernement, lequel négocie à partir de l’effroi une longévité du pouvoir artificielle et dangereuse. Plus tard, au sec, j’écris à mon amie chinoise de New-York. Elle est là, malgré le décalage, et aussitôt répond. Elle dit: “je ne prends pas de nouvelles de mes amis, car j’ai le sentiment désagréable de chercher à savoir s’ils sont encore vivants”. Elle parle des oiseaux. De retour. Je sais. Mais au bout de deux mois de cyberemprisonnement, ces oiseaux semblent tout à fait compatibles ave les humains. Affaire de capital. De capitalisme. De connerie blanche. Exactement, de gestion non-délirante du capital (ce qui, avec l’annonce hier tombée de l’augmentation sur 6 semaines de 45% de la fortune de l’indic universel Zückenberg, gagnant majeur du caviardage des libertés, semble plutôt mal prometteur). Après quoi, je me mets en contact avec une Birmane, chercheuse au CNRS, qui répond avec un grande amabilité aux questions de détail qui vont me permettre de boucler les corrections du manuscrit Naypyidaw. En soirée, sous la pluie toujours, je prépare cartouches et gilet, armes longues et courtes, pour aller demain, dans la montagne du Valais, soumettre mon peu d’habileté au savoir pratique des instructeurs du club de tir.
Dieu 4
Dieu ne sait rien, il est donc absolu. Du peu qui constitue sa réalité matérielle, l’animal sait tout. Sa survie est une compréhension. Il est donc relatif. L’homme n’est ni absolu ni relatif. Il crée Dieu, ou plutôt il nomme ainsi la limite supérieure. Et constate l’animal, dont il fait sa limite inférieure. C’est pourquoi il est progrès: possibilité d’une trajectoire entre un principe incompréhensible et un but changeant.
Dieu 3
Le dieu vivant, c’est l’homme. En tant qu’il est capable de penser un Dieu et de s’y assimiler, donc de devenir esprit. La force tant vantée par nos sociétés de fidèles de l’outil est une force nécessaire et insuffisante. Parvenue au meilleur degré de réalisation, elle n’est plus que le triste résultat d’une compétition vers l’absurde. Nous devons devenir ce que nous sommes, un individu fini qui tend à l’infini, un individu compénétré et conscient de se pouvoir lentement, très lentement, dépasser par le travail intérieur.
Dieu 2
Dieu est un phénomène d’expansion. Il est spirituel parce que produit par l’esprit. Il existe aussi longtemps que vécu, puis se contracte, se love dans la mémoire. Il reparaît à la faveur d’un moment de génie. Il est faussement dit que ce moment de génie est produit par un appel de Dieu. C’est l’inverse.