Mois : octobre 2024

Week-end

Trois jours sur les bor­ds du lac de Neuchâ­tel, à Bevaux, avec Gala, Aplo et Luv, et son ami, un aimable étu­di­ant à boucles d’or­eilles et pan­talon bouf­fant. Le pro­prié­taire de la loca­tion allume un feu dans une soucoupe géante posée sur le gravier du jardin. Aplo sculpte une cit­rouille. Il m’of­fre un abon­nement UFC. Le lun­di et le mar­di, cha­cun repart dans sa direc­tion, Gala Lau­sanne, Aplo Genève, Luv Neuchâ­tel, pour moi l’Es­pagne, via le camp­ing de l’Isle-Blanc et ses cen­trales près Montélimar.

Schweiz

Après huit heures de route au départ de l’Alle­magne, récupéré les socles de bois qui servi­ront d’as­sise pour le cube à la sci­erie de Zoll­haus, en con­tre­bas du Lac noir. Comme le périmètre de l’u­sine ferme à 19h00, il faut cacher une moitié des socles — ceux qui ne tien­nent pas dans le van — der­rière un stand de tir aban­don­né si l’on veut en dis­pos­er avant lun­di. Je viens de pay­er ce matériel Fr. 1700.-. Et alors? Le ser­vice n’est pas com­pris. Gala déposée à l’hô­tel de Swartzen­burg, Domo et moi revenons à Zoll­haus, char­geons le reste des socles, roulons sur le Pont de Berne, déchar­geons le stock en vielle-ville de Fri­bourg, puis je reviens à Schwartzen­burg, dans le brouil­lard, la nuit, man­quant écras­er un fou qui marche le long de la route et sur la route, un fou qui marche de nuit, sans torche. 

Culture

Mag­nifique Bav­ière à Waal. Tables de bois à l’auberge, bock de blonde servis par de jeunes gens blonds, mar­ronniers cen­te­naires der­rière les fenêtres à croisil­lons, clocher à bulbe et une cham­bre au par­quet ver­nis qui occupe un demi-étage. Terre riche, paix, langue, un havre pour l’esprit.

Mosonmagyaróvár 2

Bourg plat, endor­mi, sans âge. De la lumière jaune der­rière les fenêtres à rideaux. Des cou­turières en fichus dans les cours pavées, en vit­rine des robes de mar­iées, dans le canal du vieux moulin de l’eau claire. Sor­ti d’un café pour alcooliques, un nain se pré­cip­ite à notre ren­con­tre. Il me tend la main, demande d’où je viens, demande où je vais, demande de l’ar­gent. Sous un grand cru­ci­fix, une fille fait le trot­toir. La brume accroche à nos semelles. Retour à l’hô­tel, le Sim­bad (et ses bains d’eau de source). J’évite de manger. Me rem­plis de bière. Gala com­mande un canard. Patates farineuses, sauce à grumeaux, légumes mous. Elle rap­porte son plat à la serveuse: “don­nez-ça aux chiens!”.

Guide-ânes

Au Kiskakukk, le restau­rant vieille Hon­grie de la rue Poz­sonyi, côté salle boisée, avec ma belle-mère que je remer­cie de son aide dans la négoce des cubes et du prochain trans­port vers la Suisse ren­du pos­si­ble par un de ses con­tacts. Autour de notre table, des Asi­a­tiques de toute l’Asie. Dix, douze, quinze. Des auda­cieux venus au Kiskakukk sur la foi d’un guide touris­tique pour Asi­a­tiques. Gala, Chiara et moi sommes les seuls à manger, boire et con­vers­er. Les Asi­a­tiques décryptent le menu, com­man­dent du bout du doigt, pho­togra­phient leur plat, goû­tent, picorent, paient, s’en vont. Pour cause: ils ne vien­nent pas manger, ils vis­i­tent. Et pas un pour boire. Des ver­res d’eau.

Monory city

Le quarti­er chi­nois de Budapest, une rue au milieu d’une friche, pleine de Chi­nois, des Chi­nois qui trans­portent, négo­cient, pal­abrent, ava­lent des nouilles et jouent aux cartes, comptent leur argent et leurs avoirs, briquent des Lexus, des Porsche, des Mer­cedes. Je cherche du tis­su tech­nique en rouleau pour l’emballage du cube. Domo a con­tac­té une courte­pointière suisse, elle a don­né les indi­ca­tions. Porte à porte toute la mat­inée. Des sou­tiens-gorge, des pan­neaux solaires, des pouss­es de soja, pas de tis­su. Dans une cour intérieure, der­rière une fontaine en stuc décorée de pan­das adultes, des palettes brisées, des déchets de car­ton, des que­nouilles de cel­lo­phane et au sol, deux car­cass­es de cochons san­guino­lentes. A la fin, je demande à un Chi­nois s’il par­le anglais. Il ne par­le pas anglais. Je repars bre­douille à tra­vers les ban­lieues qu’Or­ban rase ici et là par coupes som­bres pour bâtir des stades ovoïdes, rec­tan­gu­laires, sphériques, des stades géants, enc­los der­rière des grilles, dés­espéré­ment vides, qui affichent des mes­sages élec­tron­iques: Steffie Graf ten­nis exhi­bi­tion, Pan­tera met­al night, Anoth­er Brick In The Wall inter­na­tion­al show…

Cubetraining TM

Nos dix pre­miers cubes d’en­traîne­ment de 1 m³ rangés sur palette dans l’en­tre­pôt de la multi­na­tionale Polifoam en ban­lieue de Budapest — j’ad­mire, je me réjouis. Près d’une année et demie de tra­vail depuis la créa­tion du pro­to­type au FabLab de l’U­ni­ver­sité de Saragosse. L’opiniâtreté paie. Au lieu de dépenser Fr. 10’000.- comme le demandaient les agences de design “souris et Nespres­so”, juste pour les plans, compte non-tenu de la fab­ri­ca­tion, j’ai obtenu dix cubes pour le prix de Fr. 2000.-.

Mosonmagyaróvár

Hôtel Min­er­va, un édi­fice à l’ar­chi­tec­ture social-réal­iste, à peine éclairé. D’emblée la récep­tion­niste, une fil­i­forme goth­ique (ou dépres­sive) prévient: “les cham­bres ne sont pas chauf­fées”. Gala proteste. Elle obtient un ven­ti­la­teur de poche. Branché sur la table de nuit, l’air chaud remue autour des meubles cassés de vieilles odeurs. Au petit-déje­uner, tech­no-FM mag­yar. Je fais assour­dir le chahut. “Les clients aiment”, fait val­oir la femme de ménage. Or, nous sommes les seuls clients.

Munich

Rési­dence à Ober­men­zin­gen, au camp­ing. Au fond du ter­rain, der­rière les arbres, des Aus­traliens plient les restes des “after-hours” de la Okto­ber­fest. Le bar à bière est au repos, ce qui m’oblige à appro­vi­sion­ner le frigidaire du bord en Augustin­er et Hack­er-Pschörr aux éta­lages du Edel­ka. L’après-midi, nous visi­tons la Lem­bach­haus, le musée des expres­sion­nistes du groupe Blau Reit­er. Sous le tem­ple grec de la Königsplatz, des dizaines de clochards d’Afrique. Qui dor­ment, se saoulent, divaguent. Devant un camion vert de la gen­darmerie, un polici­er observe les bras croisés, le regard dans les nuages. Expo­si­tion tem­po­raire Beuys, ce char­la­tan. De superbes paysages de Kandin­sky, péri­ode avant-matu­rité et des toiles théosophiques au délire ajusté. Retour en bus dans notre ban­lieue boisée les vans étant inter­dits de pénétr­er dans la ville. Le soir, recherche d’un restau­rant à l’an­ci­enne. Dînons dans une auberge de 1660 avec des familles bavaroise sor­ties de terre et fes­tives, et endi­manchées, sous des hures de cerfs, chamois, chevreuils, marcassins.

Travail

Nuit d’hô­tel à Plafeien avec Gala. La cham­bre donne sur l’église, l’ar­rêt de bus, un canal. Dès 5h30, cir­cu­la­tion intense, la Suisse tra­vaille, nos lits tremblent.