Mois : août 2009

Femmes qui jouent aux femmes heureuses, le verbe haut et vril­lé, le geste hys­térique, occu­pant tout l’espace.

Les ani­ma­teurs de la colonie de vacances à laque­lle par­ticipent les enfants les envoient frap­per aux portes des maisons d’Astaffort, un bourg de quelque 3000 habi­tants. Con­signe leur est don­née de rap­porter une liste d’ob­jets et ils les rap­por­tent en effet: raque­tte, sou, mag­a­zine, pot de fleurs, ballon.

Cette bib­lio­thé­caire à qui je demande une ren­seigne­ment qu’elle n’a pas et dès lors qui me bat froid. Quelques jours passent pen­dant lesquels je redou­ble de préve­nance sans réus­sir à la défroiss­er, puis un après-midi elle se trou­ve à servir une cliente dans mon dos et se mon­tre vol­u­bile, pleine de con­nais­sances et de con­seils, tout cela à voix haute, pour que j’en­tende qui elle est. Le lende­main, elle a de nou­veau le sourire.

Une fois retranché du camps des social­istes ceux qui se désig­nent ain­si parce qu’ils prof­i­tent des largess­es de l’E­tat et ceux qui, pour faire car­rière poli­tique, tâchent de con­va­in­cre les précé­dents qu’ils admin­istrent cor­recte­ment leurs intérêts, qui reste-t-il?

Salle com­mu­nale de Gim­brède louée pour un mariage. Un cortège de voitures déboule. Femmes fagotées, enfants morveux. Con­cours de quads, beu­ver­ie. Hommes à torse nu beuglant, chi­ant, vom­is­sant. La vue de ce groupe de dégénérés pro­duit l’ef­froi. Très vite on pense: je partage avec eux. Pire : on m’oblige à partager, on me conçoit comme leur égal. La fête dure jusqu’au matin, le vil­lage se terre. Les plus malins, les plus lâch­es, se sont sou­vent les mêmes, ont découché et ne revien­dront que le lende­main, lorsque les bêtes se seront tues, les autres enfon­cent du papi­er dans leur oreilles. Plus tard dans la semaine les langues se délient. L’en­vie de meurtre est pal­pa­ble. Cha­cun fait état de son dégoût.
L’é­gal­ité des droits est une aber­ra­tion sans égal­ité des devoirs et la tolérance en la matière un accéléra­teur des vio­lences à venir.

Tel ami qui ne tra­vaille pas, sort peu, ne par­ticipe à rien, se dit social­iste. La plante d’in­térieur, si elle par­lait, approu­verait son jardinier.

Du repas des chas­seurs pris en sa com­pag­nie l’an dernier, à quelques mètres des maisons, sur place extérieure du vil­lage, M. dit cette année, comme nous l’in­vi­tons : “oh non, ce n’est plus de mon âge!“
L’an dernier elle avait qua­tre vingt treize ans .

Le long de ces routes qui tra­versent les paysages détru­its, je me sou­viens de tout et je marche sans répit, il ne faut pas songer à dormir. Dès que je mon­tre des signes de las­si­tude, des hommes s’ap­prochent et me pro­posent des morceaux de par­adis. L’autre soir, trop faible pour les con­tr­er, je me suis assoupi: au réveil, j’avais un jardin et des fontaines autour de moi, et ces hommes souri­ants venaient m’ex­pli­quer la chance que j’avais d’avoir retrou­vé un sens à ma vie.

2050 — je sors mes os de terre, un à un les assem­ble, reprends mon chem­ine­ment. Le pre­mier kilo­mètre fait sen­tir le planch­er des vach­es, je suis de retour. Cette activ­ité de vivant manque toute­fois de coeur, je sens que je ne veux rien, que rien ne me retient. Alors dans ce vil­lage dont j’ou­blie le nom, un soir je vais au cimetière, trou­ve une tombe anci­enne, soulève la dalle et remise mon squelette.

Après la tem­pête de décem­bre, la voi­sine demande au petit A. devant le tilleul dérac­iné:
-Sais-tu com­ment est tombé cet arbre?
- Non Madame, mais en tout cas, ce n’est pas moi.