Ce matin, écrivant Noria, je m’amusais du dialogue des personnages. Tout à mon entrain, je forçais le trait. Ce qui m’amuse moins, c’est le sentiment que nul ne voudra publier un tel texte, de crainte de se mettre au ban de la pensée légale, laquelle, quoiqu’on en dise, est une obligation pour tout intellectuel qui veut conserver le droit d’émettre à destination du public sans être taxé de terroriste.
Mois : décembre 2016
Optimisme
Si je suis aussi optimiste, c’est que nous arrivons au terme du processus d’avilissement. Une fois de plus, devrais-je dire. Les effets de la dernière forme du capital auront été catastrophiques; peut-être ne sont-ils pas irréversibles, du moins socialement. Pour la dimension écologique, c’est une autre affaire. L’élite croit connaître le peuple. Elle le connaît assez pour mener à bien son programme d’instrumentation générale. Mais la psychologie qu’elle lui impute entretient avec sa psychologie profonde un rapport de plus en plus irréaliste à mesure de la réussite de l’entreprise. Dès lors, ce qui dans l’ordre de la prescription politique lui apparaît comme devant fonctionner à l’avenir pour avoir fonctionné par le passé, apparaît aux yeux du peuple comme une provocation. Alors intervient la rupture.
Inondations
Hector sur les inondations de dimanche. “Je rentrais de la discothèque à sept heures le matin (il est garde). Sur la route des montagnes, je suis passé de justesse. Les deux automobilistes qui suivaient se sont embourbés. Il m’a fallut quatre heures où je mets d’habitude vingt minutes. Alors, dans le bas de la ville, je n’ose pas imaginer! Mais la bonne nouvelle, c’est que cela va donner du travail aux maçons et aux peintres. On a besoin de travail!”
Chaises 5
De retour de Cadix, arrêt chez le géant suédois. Après avoir marché un kilomètre entre des intérieurs en morceaux, nous achetons des morceaux de meuble. Face à l’étagère de vingt mètres, cherchant nos chaises, je dis à Gala:
- Je crois que ça ne va pas être possible. Elles sont en deux parties.
Des caisses, je regarde en direction de la cafétéria. Dix machines gris plombs alignées sur un plan de métal. Les familles travaillent à produire des jus d’orange, des cafés ou des hot-dog.
De retour dans l’appartement, je vois que le propriétaire n’a pas enlevé les vieilles chaises. Aussitôt déposée la valise, j’empoigne ces débris et les balance dans le couloir. Une voisine sonne: “vous comprenez, j’attends des amis, ça ne fait pas propre”. Elle a raison. Je griffonne le numéro du propriétaire. Ramon appelle. Je lui raccroche au nez. Il y a six mois, j’ai demandé à ce qu’il me débarrasse de ces chaises. A ce rythme, combien de chose peut-on faire dans une vie? Au fond, je devrais être rassuré: l’Espagne ne sortira pas de la crise, qui est le meilleur des états pour qui aime le monde plutôt que la société.
Demain
Rien ne m’intéresse plus. Sauf ce qui se passe derrière ce qui devrait nous intéresser tous. Passer de l’un à l’autre est le véritable défi humain. La société vole en éclats, commence la mise à nu. Dans cet état neuf, nous redevenons le jouet des forces transcendantes. La plupart succombe. La chute du faux augure l’ère des individus. Enfin apparaissent des vivants.
Voiture
Se vérifie ce que l’on savait: moyennant quelques modification techniques, une voiture carburerait tout aussi bien à l’eau. De cette information, la presse cherche à faire une anecdote pour livre des records. Tirer les conséquences de ce constat reviendrait en effet à engager des bouleversements géopolitiques majeures, bref à changer le monde.