La Isleta est un hameau construit entre deux criques. Les maisons blanches s’arque-boutent autour d’une place où l’on trouve une fontaine (sans eau) et un bassin pour lavandières (sans eau). Dans sa partie supérieure, au milieu des pitons rocheux, l’épicerie Sarah. J’envoie les enfants chercher le pain au réveil, la bière à midi et le soir. Debout derrière la caisse, se référant à l’horaire qui affiche “ouverture de 9h00 à 21h00”, Sarah dit:
- Oh, non, je ne vais pas fermer maintenant! Passé vingt-deux heures, s’il n’y a plus personne, nous verrons! Mais il y en a qui ne sont pas encore rentrés de la plage!
Notre maison a un balcon. Lorsque le vent souffle sur le désert, il change de couleur. Les murs peints à la chaux virent au rouge. Ces jours-là, nous nettoyons la table de plastique à grande eau. Pendant la sieste, les enfants sautent dans la rue; je garde la clef. Ou alors, ils regardent la télévision toutes persiennes closes. A l’opposé de la place, au pied de brèves falaises, trois plages. La mer n’offre jamais le même visage: lisse un jour, elle est démontée le lendemain puis modifiée par des courants, sablonneuse et à nouveau limpide, traversée de poissons. Nous dînons de nuit, tard, longtemps.