Quatre idées qui entretiennent des rapports grossiers, subtils et sans fin.
Acheter ce qu’on pas les moyens d’acheter.
Vendre ce qu’on possède.
Se laisser posséder.
Le plus vieux métier du monde.
Mois : mai 2015
Achat-vente
Etranglement 2
Comme la douleur est toujours forte une semaine après que le professeur m’ait retourné, étranglé et jeté à terre, j’appelle le médecin. La consultation est complète. J’obtiens un rendez-vous pour la semaine suivante. Ne sachant toujours pas ce que nous avons dans le cou, os, muscles ou nerfs (pourquoi n’ai-je pas feuilleté le Larousse médical?) j’en discute ce soir avec le militaire.
- Du cartilage. Fragile, me dit-il.
Puis sans transition, ile se met à parler des chiens, de la façon sont il se jette au cou, de leur vitesse, de leurs crocs.
- Ils ne lâchent pas avant que le maître les siffle.
Ce qui me rappelle l’admiration de l’instructeur de police, le mois dernier:
- Vous savez pourquoi le pitbull gagne? Pas parce qu’il est puissant, encore moins en raison de son poids, après tout il ne pèse que huit kilos… Il gagne parce qu’il n’a pas l’idée de perdre.
Et d’ajouter, après un silence:
- Alors Messieurs, au travail!
Passe-temps
Son passe-temps favori consistait à faire disparaître les cartons d’emballage dans les objets qu’ils emballaient. Au début, il s’exerçait sur des cartons à chaussures qu’il bourrait dans les chaussures, puis il était passé aux appareils-ménagers et aux chaînes hi-fi. Son but était désormais de réussir la manœuvre pour une barquette de six œufs
Travail
Si j’avais à travailler, je vieillirai plus vite, non pas en proportion de la fatigue provoquée par le travail, mais par le manque de sommeil, n’étant plus en mesure de compenser en matinée les heures que je perds dans l’insomnie de la nuit. A moins que la fatigue provoquée par le travail me débarrasse des insomnies. Mais la fatigue physique ne pouvant être plus grande qu’elle l’est aujourd’hui telle que provoquée par le sport, ceci prouverait que le travail est d’abord une limitation à l’exercice intellectuel de soi, lequel est à la fois remède et poison .
Etats-Unis
Israël, l’Américain, sur les berges du lac de Kyaing Tung en Birmanie où nous dînions seuls en février, me disait: “le peuple des Etats-Unis ne s’intéresse pas à l’Europe. Même s’il devait y avoir la guerre, il ne bougerait pas. D’ailleurs, il en va de même pour le reste du monde. Après tout, nous sommes protégés par deux océans”. C’est le contraire pour le gouvernement. Particulièrement depuis le noyautage des instances dirigeantes par l’équipe du président Bush père. A cet égard, dans une déclaration récente, le général Wesley Clarke, désormais libéré du secret lié à la fonction, révèle que quinze jours après la destruction des tours jumelles, les agences gouvernementales les mieux renseignées avaient connaissance du projet d’attaque contre sept pays arabes de la méditerranée et du moyen-orient sur cinq ans, dont la Lybie et la Syrie.
Duras
Impressionnante Marguerite Duras! Je lis Yann Andréa Steiner. Ce qu’elle dit? Le sait-elle seulement? Et pourtant, on l’entend. Je ne dis pas qu’on le comprenne, mais on l’entend. Même quand les phrases, jouant des tours au français, déboîtent et défont le sens: on entend encore — impressionnant.
Réunion
Réunion de travail à Charmey. Monfrère, Villaret, moi.Trois heures sur la terrasse de l’hôtel Sapin, puis deux heures à table, puis encore trois heures en terrasse. Après quoi nous embarquons chacun dans notre voiture et roulons cinq cent mètres pour attendre le parking de la Résidence Bellevue où Monfrère a retenu deux chambres. Il s’aperçoit alors qu’il n’a pas reçu le code d’ouverture des portes. Il appelle. C’est occupé. Il rappelle. Le propriétaire de l’hôtel s’excuse: il a oublié. Quelques secondes plus tard, deux suites de chiffres s’affichent sur l’écran du téléphone. Nous les tapons sur le boîtier qui commande l’ouverture de la porte principale. Elle résiste. Nous imaginons des trucs. Nous inversons les deux derniers chiffres. Sans résultat. J’essaie d’autres portes. Fermées. Soudain, Villaret nous ouvre de l’intérieur. Il a fait le tour, trouvé une fenêtre ouverte, celle de la cuisine, et le voici. Nous entrons. Nos chambres sont les 31 et 32. Nous montons au troisième étage. La dernière chambre, en soupente, est la 28. Agacés, nous redescendons. Villaret remarque: “Hum, sympathique!” Un fauteuil roulant, des béquilles, des cuvettes.
- Les gars, nous sommes dans un home de vieillards!
Monfrère relit le message qui précède les codes d’entrée. “Tu as raison, dit-il, es chambres sont sous le parking, non pas sur le parking”. Nous trouvons les chambres 31 et 32. Profondes, bien aménagées, munies d’une baie vitrée qui donne sur les prairies et la montagne. Sauf que l’une des deux refuse de s’ouvrir. Monfrère rappelle la propriétaire. Qui donne une autre suite de chiffres. Cela ne marche pas. Monfrère monte le ton. La propriétaire, échevelée, accompagnée d’une gamine de six ans, rapplique. Elle manipule le boîtier d’ouverture, s’excuse, essaie encore, renonce, tend une clef, s’en va. Nous reprenons enfin la réunion. Deux heures sur la terrasse, devant les chambres, dans le soleil déclinant, puis au café du village. Les questions abordées étant résolues (noua avions prévu deux jours de discussion), Villaret demande s’il peut éviter de revenir de Genève le lendemain. Sur ce, il saute dans sa voiture et rejoint l’autoroute, tandis que Monfrère et moi, commandant de nouvelles bières, passons le reste de la soirée puis une partie de la nuit à boire et manger, nous félicitant d’avoir obtenu satisfaction sur les points rédigés la veille, tous engageant l’avenir de l’entreprise, particulièrement en ce qui concerne la réduction du temps de travail.