Gala dort trois jours. Soudain elle se lève.
- Je suis pressée.
Elle sort, fait sa valise, annonce qu’elle part en France pour une semaine.
Mois : janvier 2014
Départ
Heure zéro
Au pied des bâtiments du site Miséricorde de l’Université, une horloge digitale effectue un compte à rebours sous le mention Partage des savoirs. Lundi, je roulais de nuit dans ce secteur. L’affichage annonçait: 305 jours, 11heures53. Quand je suis arrivé à Fribourg, nous étions à ‑700 jours de l’échéance. Le temps qu’il reste est à peu près celui qui me sera nécessaire pour rédiger l’essai sur la stabulation. Ensuite il ne me restera plus qu’à partager son savoir. Et attendre les remous. Ce sera l’heure zéro.
Aplo
Aplo a deux ans, nous sommes à Xalapa, dans le centre du Mexique. Arrivés en convoi nous logeons dans un hôtel ancien. Les chambres sont tournées vers l’intérieur, une fontaine coule au milieu du patio. Dans la soirée une collègue de Toldo, future enseignante en sciences occultes, nous rejoint. Olofso tient notre bébé dans les bras. Il est sans chveux, sa tête est ronde, ses yeux bleus et grands. Elle s’écrie: un enfant de la nouvelle ère! L’observe et confirme: il n’est pas comme les autres. Il connaît les cycles, il ne s’intéressera pas à l’argent, il a déjà vécu plusieurs fois. De ce jour, nous nommons cette dame, la sorcière. D’ailleurs, elle en a l’aspect: petite, le regard perçant, la voix aiguë, le caractère péremptoire. Et pourtant. 12 ans plus tard. Aplo ne s’intéresse pas à l’argent. Et ce dimanche, sur la montange, il se fige.
- Je connais parfaitement cet endroit. J’y suis déjà venu plusieurs fois.
Ceci sur le ton de l’évidence. Avant de se remettre en marche. Le déjà-vu, soit. J’y suis sujet. Mais l’expression qui était la sienne. Je ne connaissais pas. Sa soeur qui nous accompagnait ne dirait jamais cela. Et dans tous les cas, par sur ce ton qui donnait à son assertion un caractère de vérité inattaquable.
Ouï-dire
A un ami, j’annonce hier la présentation prochaine, sous la forme d’une allocution, du livre easyJet à Genève. Pétexte à la vente et plus avant, à la rencontre, en particulier d’amis Au bout du fil, je l’entends dire qu’au même endroit ce jeudi lit un écrivain connu et d’ajouter: c’est formidable! Ce matin, par courrier électronique, je reçois comme de nombreuses autres destinataires appartenant au fichier des clients de la librairie, l’annonce de ma présentation. L’ami rappelle. Figure-toi que j’ai reçu une invitation à ta présentation! Tu ne m’avais pas dit!
- Je te l’ai dit.
- Ah, oui, peut-être.
- Enfin, maintenant c’est sûr. Et juste après un écrivain connu!
- Et avant d’autres écrivains, rien d’étonnant.
- Tu es trop modeste. Tout de même, c’est vraiment bien. Et puis il y a cet article qui est paru.
- Je t’en ai parlé hier.
- Un excellent article. Il semblerait que ton livre soit bon.
Dualisme
Jeune homme que je croise à la boxe, au Krav Maga, qui en sus des ces entraînements, pratique le boxe thaïlandaise et trouve encore le moyen de combiner ces sports de combat avec des séances de course à pied. Universitaire, il étudie l’histoire et la littérature. Je veux en savoir plus; il précise ses champs d’intérêts: les guerres de religion, Georges Bernanos.
Tension
De même qu’il y a en peinture tension entre les couleurs, il y a en littérature tension entre les mots. La visée de l’artiste au moment d’entreprendre son travail tend à une organisation favorable des tensions. Les moyens sont indécidables, ils relèvent de l’alchimie. Les mots étant à la fois imprécis et riches et ces deux qualités n’en formant en réalité qu’une, la précision est donnée à un niveau supérieur: celui du texte dans le cas de la littérature, du tableau dans le cas de la peinture. La réduction des termes a un sens univoque afin d’organiser sur une base logique une pensée non-ambiguë est un projet éternel de la philosophie. Outre qu’il me semble impossible, il a une conséquence certaine: la réduction chez celui qui s’emploie à cet effort de construction scientifique de son humanité laquelle, en dernière analyse, dépend de la contingence.