Trou

En attente de l’avion dans une ban­lieue pous­siéreuse d’Athènes, Artemide. L’ap­parte­ment est instal­lé au-dessus d’une boulan­gerie, la rue qui con­duit à la mer n’a pas de trot­toir, elle est mortelle. Nous la descen­dons en trem­blant. Les véhicules roulent à tombeau ouvert. Plusieurs fois, je gare Luv. Le seul restau­rant est fer­mé. Plus loin, un kiosque. Je me ren­seigne: “où peut-on manger?”
-Ma foi, dit la dame, c’est le grand ven­dre­di.
Nous achetons un paquet de chips. Nous sommes assis sur le per­ron d’un immeu­ble aban­don­né, des chiens s’ap­prochent. Je ramasse un essuie-glace. Dans un autre kiosque, nous prenons des pâtes et un boîte de sauce. Quand luv se couche, je veux pren­dre une douche. Pas d’eau chaude. Je trafique le tableau élec­trique et pose une bom­bonne d’huile d’o­live à côté de notre lit me promet­tant de la vers­er dans la machine à laver si je n’ai pas d’eau le lende­main, avant de par­tir pour l’aéroport.

Elle

Quand elle dit, “je viens” cela ne sig­ni­fie pas qu’elle va venir. D’ailleurs, pour éviter le décep­tion, je com­mence par penser: “elle ne vien­dra pas”.

Soleil 2

Antoni: “mes grands par­ents, dans leur chaloupe de bois, à la voile ou par temps plat à la rame, met­taient deux jours pour rejoin­dre le port depuis la plage de Trip­i­ti. Aujour­d’hui, je fais le tour de Ios en quelques heures. Ce n’est pas pos­si­ble, non, ce n’est pas possible…”

Dubaï

En route pour San­torin, longue dis­cus­sion avec cette Cana­di­enne qui enseigne la philoso­phie à Dubaï. Luv est allé dormir dans la salle d’at­tente, nous buvons des bières sur le pont. De ses étu­di­ants, prin­ci­pale­ment des réfugiés syrien, elle me dit: ils vont pass­er le week-end chez eux et me revi­en­nent avec des pho­tos de ski nau­tique, de piscines d’hô­tels et de dis­cothèque.
-Des familles proches du régime?
Elle acqui­esce.
-Et que peut-on bien leur enseign­er?
-Pop­per.
-La société ouverte? Pre­mier vol­ume alors?
-Oui, pour le deux­ième, je ne sais pas si ça va être possible.

Drapeaux

Aus­sitôt que le fer­ry a pris ses dis­tances avec le port de Ios, le mousse descend le dra­peau grec et le dra­peau de la com­pag­nie Hel­lenic. A l’ap­proche de Nax­os, il remonte les deux dra­peaux. Puis les redescend. Avant d’ar­riv­er à Paros, il les remonte. Et ain­si de suite, jusqu’au Pyrée.

Soleil

Antoni, le cap­i­taine que nous avons engagé à Ios, me dit: “Vois-tu, les Améri­cains aiment assis­ter à des couch­ers de soleil. Chez eux, ils ne voient pas le soleil, il y a trop de buildings”

Ignorance

Tant qu’ils croiront que Dieu est grand, ils vivront dans l’ig­no­rance et dans la guerre. Des­tin sub­limé par l’oc­ci­dent blanc et rai­son suff­isante pour ne rien céder de nos prérog­a­tives ni de nos territoires.

Folegandros 2

Au vil­lage de Cho­ra, ce chien qui entre par une mai­son, ressort par l’épicerie, entre dans un restau­rant, ressort par la classe d’é­cole. Et tout le monde l’ap­pelle par son nom.

Chèvres

Loin du rivage, un cail­lou. Plan­té de biais dans les eaux, il n’est pas plus long que la coque d’une transat­lan­tique en phase de naufrage. Dessus, huit chèvres.

Folegandros

Bâti au-dessus d’une falaise, le vil­lage de Cho­ra (qui occupe comme son nom l’indique le cœur de l’île) est blanc et bleu, mais en avril, après les rigueurs de l’hiv­er, il a per­du quelques degrés de lumi­nosité aus­si les habi­tants sont-ils ce matin occupés à le repein­dre. Hommes, femmes, vieil­lards ado­les­cents, mais encore tous les enfants sous les ordres de la maîtresse du pri­maire, se promè­nent sous les figu­iers un pinceau à la main et dessi­nent les façades, les per­spec­tives, les con­tours de fenêtres et jusqu’aux dalles des trot­toirs dans l’at­tente des pre­miers touristes.