Poubelles

Un illu­miné quel­conque a décidé qu’il fal­lait un jeton pour ouvrir les con­teneurs à poubelle. Depuis, les trot­toirs sont jonchés de sacs.

Henri

Mon­ther­lant pro­duit de la lit­téra­ture avec de la pen­sée, d’où ce côté quelque peu austère, à rebours de l’ap­proche générale des écrivains qui con­siste à pro­duire de la lit­téra­ture avec des mots, aban­don­nant sans état d’âme la pen­sée à elle-même.

Savoir-vivre

Ner­vosité à fleur de peau des Ital­iens toute entière au ser­vice des petites déci­sions qui ennuient la vie matérielle, que l’on démet ain­si au plus vite afin de se con­sacr­er à l’essen­tiel, la con­ver­sa­tion, la prom­e­nade, la dis­cus­sion, la bois­son, la table.

Italie X

Etre à Flo­rence, ou plutôt à Gal­luz­zo, dans les faubourgs, sans se ren­dre nulle part, et moins encore au cen­tre de la ville où vont les cortèges de vis­i­teurs, pro­duit un sen­ti­ment mit­igé d’in­scrip­tion forte dans le paysage accom­pa­g­née d’une pro­gres­sive igno­rance du pays dont il fait partie.

Crépuscule

Pour nos enfants, je note: tan­dis que le total­i­tarisme se met en place dans toute l’Eu­rope, voulu et organ­isé par les fonc­tion­naires européens et nationaux sous la com­mande des cer­cles réels du pou­voir, il n’y a que peu de résis­tance. Quelques héros pop­u­laires se dressent, Julian Assange, Tom­my Robin­son, Pierre Cassen, Boris Le Lay, Jérôme Rodrigues. Une minorité écrit et dénonce. L’écras­ante majorité, tétanisée, veule, peut-être bête, par­ticipe avec ent­hou­si­aste à la mise en place du nou­veau sys­tème. Plus que cela, on la devine prête à entr­er au ser­vice du pou­voir afin de bris­er toute opposition.

Pente

Dernier avatar des lég­is­la­tions total­i­taires issues du moule du poli­tique­ment cor­rect, la Con­ven­tion d’Is­tam­boul. La Pologne rat­i­fie et se ras­sure: le peu­ple saura opposé le bon sens à ce tis­su d’inep­ties. Il y a trente, ans, je pen­sais de même s’agis­sant du peu­ple suisse.

Réalisation

Mon rêve, et je m’en fai­sais dès l’abord une image com­plète, a tou­jours été d’être assis à la table de tra­vail, en silence, avec une tasse de café et de quoi écrire, me dis­ais-je ce matin, assis à ma table de tra­vail avec un café, occupé à cor­riger mon essai.

Séquence historique

Mise en place, partout dans l’Eu­rope de cette séquence his­torique récur­rente: social­isme doc­tri­naire des Etats, réac­tion du peu­ple natif, répres­sion, polar­i­sa­tion, guerre.

Voies

Ten­té une fois encore de me ren­dre à pied à Scan­dic­ci où se trou­ve la palestre. Comme la dernière fois, la Mer­cedes verte est là, sur le côté du pont. Je me trompais, ce ne sont pas des pêcheurs descen­dus à la riv­ière (je le croy­ais à cause des chais­es dis­posées sur les îlots, en réal­ité des débris que char­rie l’eau et que redresse quelque rigo­lo), la voiture est d’un voisin. Sur la ban­quette arrière, trois cha­peaux des années 1950: ils me rap­pel­lent que mes grands-pères, lorsque nous par­tions en prom­e­nade dans Lau­sanne, sor­taient tou­jours cou­verts. Ils eussent renon­cer à paraître plutôt que de se présen­ter le crâne nu. Me fau­fi­lant pour rejoin­dre la riv­ière, je vois que le volant de la Mer­cedes est armé d’un bras de sécu­rité. Amu­sant, quand on sait que dans le quarti­er, par ces chaleurs, la plu­part des véhicules sont sta­tion­nés toutes fenêtres ouvertes. Bref, me voici sur la berge. De Gal­luz­zo, mon pari est de rejoin­dre le quarti­er qui se trou­ve der­rière la colline. La carte con­sultée, le lit de la riv­ière est le seul pas­sage prat­i­ca­ble. Sans cela, il faut marcher sur des routes dépourvues de trot­toir que la cir­cu­la­tion acca­ble. Je m’en­gage sur les galets, m’ac­croche au talus, passe dans le sous-bois. Dans un champ, la trace d’un tracteur offre pour un temps un chemin, puis il me faut retourn­er à la riv­ière. Alors les choses se gâtent: je brasse dans les orties, me griffe aux épineux, essuie un nid d’araignée, lève des canards. A la fin, une clô­ture m’ar­rête. Je trou­ve la brèche, me glisse sous un pont d’au­toroute, tra­verse une éten­due de blé. Cette fois, j’aboutis sur un large chemin. Il mène à une baraque de jar­diniers. Pas de chiens, des légumes épuisés de soleil et une troupe de vieil­lards qui s’enivre dans une cabane. Sur­pris de me voir, ils m’indiquent le “sendero” pour Scan­dic­ci. Trois cent mètres plus avant, je débouche sur la route qu’il s’agis­sait d’éviter. Les auto­mo­biles rasent les murs. Je veux revenir dans la riv­ière. Elle n’a plus de berges. Une demi-heure plus tard, grif­fé sur tout le corps, je suis de retour à notre coin de ferme où m’at­tend Gala. Après la douche, je me rends à la palestre en voiture. L’en­quête est finie : dans ce ter­ri­toire exigu, semé de collines et mangé de ver­dure, ne passent que des routes ser­pen­tines. Qui pré­tend renon­cer à la voiture doit cir­culer à moto. Il y a bien les fous: ils vont à vélo et au milieu de la route, mais je ne suis ni Ital­ien ni acrobate.

Rivière

Pas trou­vé de voie pour me ren­dre de Gal­luz­zo à Scan­dic­ci où je viens de pren­dre con­trat dans une palestre: le traf­fic est épais, les sin­u­osités mangées de végé­ta­tion, les murets à demi-éboulés, ceci dans un faubourg fréquen­té de Flo­rence. Quand on débouche, ce sont des car­refours, des ponts, des sens inter­dits. Faut-il con­fess­er que tout ce qui n’est pas sim­ple me sem­ble com­pliqué. Du moins pour ces choses inin­téres­santes que l’on devrait résoudre sans autre effort, par exem­ple se mou­voir. Mais voilà, après un essai à vélo et un essai en voiture, peu con­clu­ants, je viens de con­stater que l’on peut emprunter la riv­ière — reste à voir s’il y a des berges.