Il ne peut y avoir de victoire rapide de l’un sur l’autre que si l’autre est prêt à reconnaître ses torts avant qu’on les lui explique.
Village (3)
Neige. Quarante huit heures bientôt. Du fond de ma chambre, je vérifie par la fenêtre: les flocons dansent sous le réverbère municipal. A l’étage le feu brûle. Des cent-deux litres de bière Skol, il ne reste ce soir qu’une bouteille. Comme dit le paysan: “on ne va pas tout de même pas descendre ces jours! Tant qu’il y aura à manger…”. Encore avancé La Table. Proche de la fin. Paco a quitté sa forêt de bouleaux, il boîte jusqu’à Consuegra, la ville aux six moulins (je la connais pour y avoir séjourné seul, avec Gala, puis avec Monfrère), il cache le livre que lui a confié le rebouteux Ermés. Ensuite, cuisine. Une fabada. Lard, chorizo et morcilla des Asturies. Sur des pois. Dans l’après-midi, tandis que la neige tombe, obture les lucarnes, efface les rares sons qui circulent dans Agrabuey, sieste sur le canapé. Enfin, avant d’étudier la géométrie des cadres de vélo Gravel à laquelle, force est de l’avouer, je ne comprends pour le moment pas grand-chose, entraînement au fit-ball en écoutant Ka:ast, groupe techno aux titres demi-qualité, je veux dire par là excellents en regard des productions que l’on pioche au hasard sur internet, les clips hélas médiocres (horizon du rêve, l’Amérique de Netflix).
Château de cartes
A l’instant, je pensais à ceux qui ont eu confiance dans la société, à ce titre ont construit dans le respect des règles imparties, au-delà de leurs intérêts, des relations dignes de l’homme. Avec, suppose-t-on, chaque jour un regard sur la morale (des personnes de cette trempe, j’en connais). Qu’ils soient remerciés! Honorés! Aujourd’hui plaints. Pour ma part, rendu ce jour au pied du mur que bâtissent quelques néfastes, je ne regrette aucunement d’avoir mis bas ce fardeau dès l’entrée en lisse.
Picaresque (3)
Paco, ou encore Maître Francisco, mon personnage d’ébéniste à la couille enflée vit son destin à raison de trois ou quatre pages écrites chaque jour. Enfin réchappé de la chasse à l’homme que menaient les compagnons, il est en forêt, dans un état lamentable, mange des glands et doute ne jamais pouvoir renouer avec sa passion, la construction de tables.
Rêve
Classe d’école, nous avons douze et quatorze ans. Mon pupitre est devant. Je lève la main pour répondre à une question de la la maîtresse. “Non, il est interdit de parler français, dit-elle, ce sont les nouvelles règles”. Quand son assistante fait une remarque en malais. Je renverse le pupitre, crie au scandale. La maîtresse appelle la police. Le constat fait, la police repart. La maîtresse reprend le cours. Je la gifle. Puis la console. Elle est enceinte. Doit se rendre en Espagne. “Nous pourrions nous entendre, lui dis-je, voulez vous que je vous conduise?” Elle hésite. “Ma voiture est puissante. Et chère. Très chère” Combien? demande la maîtresse. “Très chère…”.