Réorganisation

Voilà ce à quoi il faut penser — envis­ager, cir­con­scrire, penser. Ce qui fait face et avance dans notre direc­tion est néces­saire donc impa­ra­ble. Pro­duit mon­strueux d’un pou­voir illégitime mais légitimé. Aux moyens excrois­sants. Pou­voir qui se nour­rit de la faib­lesse des gens qui ont con­fi­ance dans le pou­voir, pou­voir qui se mul­ti­plie, pou­voir qui tra­vaille les rap­ports entre les vivants et liq­uide les fonc­tions naturelles des humains, pro­duit des arte­facts, les implante, sec­tionne et assem­ble les vivants selon un pro­gramme inscrit dans une idéolo­gie — pro­gramme des­tiné — pro­gramme lancé que l’on n’in­ter­rompra pas. Prenons acte: nous sommes et serons réor­gan­isés. Con­seils pour un arme­ment min­i­mum: con­cen­tr­er les éner­gies restantes, garder les yeux ouverts, cal­culer la mise en fail­lite des con­vic­tions per­son­nelles, riposter, assur­er la péren­nité morale du soi. En cette veille de com­bat, il con­vient donc de recenser tout ce qui en nous est pro­pre et plusieurs fois par jour le tester comme on fait d’un matériel. Puis de se garan­tir con­tre les menées extérieures. Pour sys­tème de défense une règle: dès aujour­d’hui, tout de ce qui vient sym­pa­thique­ment de moi doit être par un effort de con­science garan­ti non-trafiqué avant que d’être accepté.

Grippe 2020 — accélération

Passé un cap. C’est “non”. A toutes les ques­tions: “non”. Nos réserves sont immenses. Notre per­son­ne et notre force sont seules impor­tantes. Que la vague s’a­bat­te, le mot d’or­dre est: debout! Espace, déci­sion, lib­erté, affir­ma­tion:  rien de ce qui peut con­trari­er le pro­jet pre­mier du vivant n’au­ra droit de cité dans mes con­sid­éra­tions à venir. La faib­lesse mal­adive de ceux qui croient bien faire en bais­sant la tête (tête: élé­ment dis­tinc­tif dans le règne ani­mal) est une faib­lesse coupable, elle coopte dans les rôles les plus néfastes des néfastes qui sont, psy­chologique­ment et struc­turelle­ment, les hommes les plus mal­sains qu’ait jamais pro­duit au terme de son développe­ment une civil­i­sa­tion. Ceux-là prof­i­tent mal­adi­ve­ment de l’ef­fon­drement qu’ils ont con­tribué à organ­is­er. Ils ten­tent de demeur­er, con­tre nous, dans leur vie dégénérée. Ne pas laiss­er faire. Du matin au soir, à chaque minute, sur son ter­ri­toire intime, ne pas se laiss­er faire.

Grippe 2020

Sou­venez-vous: le peu­ple s’est résigné devant la répres­sion des lib­ertés parce qu’il n’avait plus de désirs. La fausse sit­u­a­tion de crise est avant tout, dans l’e­sprit des faibles, une “façon d’ex­is­ter”. Le masque est une mar­que pos­i­tive: “j’ex­iste!”. Con­tre un tel état d’abrutisse­ment des hommes, la lutte est impos­si­ble. Le pas­sage d’une société des vivants à une société des unités économiques aura lieu ces prochains mois. 

Suite

 

Au télé­phone ce soir, Gala qui se promène sur un quai de mer de la Côte d’Azur: “mais où va-t-on aller?”. La réponse unique, toute sig­nifi­ante: le déplace­ment est affaire du passé, où que nous allions nos vies sont extérieure­ment non-modifiables. 

Capitalisme funéraire

Pour créer beau­coup d’ar­gent il faut créer beau­coup de pau­vreté. La ques­tion est donc celle du vol­ume dans lequel se déroule l’opéra­tion. Où sont les pau­vres, à quelle dis­tance, quel est leur vol­ume d’expansion?

Aveu

Stend­hal d’un extra­or­di­naire prag­ma­tisme lorsqu’il s’ag­it de dévoil­er les couliss­es de son tra­vail, qu’il s’agisse d’amour, de lucre ou de poésie. Il dit par exem­ple (de mémoire): “il m’a fal­lut une heure cinquante pour écrire ce vers”. Ici, la con­fesse est mar­que de con­fi­ance en soi.

Témérité

Au retour du Tri­bunal, sur la por­tion droite de la nationale, un cycliste pédalant de toutes ses forces dans le vide aspiré d’un semi-remorque qui grav­it la côte à 60km/h. Image filmée et redis­tribuée dans le groupe, alors que l’ex­ploit est en cours. D’avis unanime: “que le camion freine un peu, il est mort!”. 

Communauté

Dis­cus­sion avec un ancien moine du monastère de San Juan. L’é­trange est la présence con­stante dans le réc­it de son chemin de spir­i­tu­al­ité des préoc­cu­pa­tions banales. Celles qu’il faut vain­cre et qu’il ne sut — de son pro­pre aveu — pas vain­cre. Non pas tant les obses­sions très catholiques de la chair, mais la par­tic­i­pa­tion au monde au sens de l’ac­tiv­ité plus large — ami­cale, frater­nelle, rela­tion­nelle — quoique sou­vent moins agis­sante, en quelque sorte la sym­pa­thie sociale. Or, quand j’y songe, je me dis que c’est d’abord là ce dont on fait son deuil lorsque l’on se tourne vers une com­mu­nauté d’en­tente sur laque­lle on mise pour s’ex­hauss­er. Si j’avais à me tourn­er vers une com­mu­nauté qui tend au sacre com­porte­men­tal d’une idée, ce serait au motif que j’en ai assez des tristes com­bi­naisons qui font société par défaut.

Hier, demain

Avec des immi­grés, on ne fait pas une société, on fait de l’ar­gent. Le précé­dent enseigne ici la suite des événe­ments. A l’in­star de la France, la Suisse devien­dra une poubelle.

Amour-déni

Ce que dit Ionesco dans ses Notes me paraît s’adapter idéale­ment à la séquence poli­tique qui défait minute après minute nos vies depuis plus d’un an: “Si je fai­sais sem­blant d’aimer ce que je déteste, je détesterais moins, j’aimerais peut-être, je me lais­serais faire, je me lais­serais vio­l­er, je fini­rais par ador­er. Il me suf­fit de dire que je ne suis pas vain­cu par l’o­gre mais que l’o­gre n’est pas un ogre et qu’il est amour, qu’il est la révo­lu­tion béné­fique. C’est ain­si qu’on s’en sort. C’est ain­si qu’on adopte les tyrans.”