“Trials of the van occupanthier” 2

Sur la route des canyons au nord de la province de Bur­gos. Des coloss­es de gran­it bar­rent l’hori­zon, les cirques sont pleins de soleil, les défilés s’ou­vrent sous nos pneus. Un cat­a­clysme tran­quille qui sem­ble délais­sé des hommes depuis la préhis­toire. Dans le rétro­viseur j’aperçois le van blanc de Mon­a­mi, le même que le mien, à la traîne et qui crache sa fumée le vieux Duca­to d’Evola. Début d’après-midi, nous sommes aux portes du Mon­u­ment naturel de Ojo Guareña, une grotte qui ser­vait de monastère. Les voûtes peintes de la chapelle dédiée à San Tir­so et San Bern­abé com­porte des dizaines de scènes de tor­tures: lyn­chage, écartèle­ment, fla­gel­la­tion, huile bouil­lante, piques aux yeux, sévices dont la guide nous explique qu’ils n’ont “aucune­ment fait souf­frir les religieux”. A l’en­trée du labyrinthe (110 kilo­mètres de galeries dont nous ver­rons à peine l’an­ticham­bre mais dont on nous bal­ance quelques images de syn­thèse) qui creuse la falaise des jar­res enfouies dans le sol où les paysans stock­aient au moyen-âge le grain cen­sé pal­li­er aux famines. De retour sur la nationale — il fait tou­jours 36 degrés — nous man­geons la plus médiocre de pael­las que j’aie goûté en cinquante ans, tiède, molle, farineuse, puis roulons en con­voi jusqu’au lac d’Ar­i­ja, lac de retenue dont la vision depuis les hau­teurs est proche du mirage. La nappe fine, irisée et bleue s’étire sur de longs kilo­mètres au cen­tre d’un désert farineux. Le vil­lage des berges, groupe de maisons plus que vil­lage est une sorte d’ag­gloméra­tion en sur­sis que tra­verse une voie de chemin de fer. A notre arrivée au café les con­ver­sa­tions bifurquent, les habitués cherchent à savoir qui nous sommes, quelle langue nous par­lons, ce que nous voulons. Quant à la patronne elle se réjouit, Mon­a­mi veut dîn­er, il veut de la viande gril­lée et une bouteille, elle va rem­plir sa caisse.