La gardienne de la “Tour du vin” ne me lâche plus. Elle aussi écrit. Elle a étudié la sociologie. “Intéressant”, lui dis-je. “Vous trouvez?”, me répond-elle. Je vais partir. “Vraiment? Est-ce que j’ai vu toutes les salles du musée? La laboratoire par exemple?”. Car il y a au pied de la Tour une exposition didactique sur la vinification. Des panneaux écrits, des photographies d’archive, une chronologie. J’entre, je ressors: trop fatigué pour lire. La gardienne me dit qu’elle a écrit un essai sur les attentats du 11M (attaque terroriste de la gare d’Atocha-Madrid le 11 mai 2004). Pas un livre, une enquête: “et j’ai trouvé la vérité, le gouvernement à menti”. Au hasard, je fais: “ce ne sont pas les Arabes?”. “Non, bien entendu”, fait la gardienne. Nous échangeons nos adresses mails. Au supermarché j’achète des glaçons et de la Skol. Dans une épicerie à l’ancienne, deux pains. Le bus est maintenant rangé sur un vaste terrain adossé la vigne, derrière une chapelle, l’Ermita San Cristobal. Je lave une salade, je bois la bière, je fais mon lit à bord du bus, drape safran, oreiller safran, duvet de plumes hongrois. Il n’y a pas un bruit, juste un chien qui aboie au loin. La chapelle reste éclairée toute la nuit. Au réveil, j’ai un message de la gardienne sur mon téléphone: “comment as-tu trouvé mon village?”.