Grave 3

Au tri des urgences. Les autres patients ont l’air d’at­ten­dre, de pou­voir atten­dre, ils par­lent, ils regar­dent, ils sont accom­pa­g­nés, ils atten­dent. Pas moi. La douleur est épou­vantable. Mes genoux, mes pieds, mes mains, ma bouche trem­blent. Une infir­mière demande mon nom, je demande un anti-douleur. Un homme en blouse sur­git d’un rideau, empoigne le fau­teuil roulant, me con­duit devant un médecin. Le médecin me couche sur un lit d’ob­ser­va­tion. “Votre cœur est en train de lâch­er, nous allons pénétr­er par le bras jusqu’au cœur”. Pas pos­si­ble, voilà ce que je me dis, ce sont les pom­pes, c’est la bagarre. Le lit roule à tra­vers des couloirs, j’en­tre en salle d’opéra­tion. Le chirurgien demande si je peux chang­er de lit sans aide. Je peux. Il présente un for­mu­laire: “en sig­nant, vous don­nez l’au­tori­sa­tion de pra­ti­quer l’opéra­tion”. Comme je sais que la police a aver­ti Gala, je fais: “est-ce que je peux atten­dre d’avoir l’avis de ma femme elle est en route (pas le cas, les flics ne la trou­vaient pas)? “Vous pou­vez, répond le chirurgien, mais dans dix min­utes vous êtes mort”.