Dîné à la brasserie genevoise la Bagatelle avec les enfants Luv et Aplo, grands, beaux, censés, travaillant, intégrés, autrement intégrés que je ne le suis (me vient en mémoire l’année où Monpère à l’âge que j’ai aujourd’hui, nerveux comme un truie devant le coutelas, lorgnant les angles d’où surgirait l’attaque, nous avait fait manger Monfrère et moi aux Grottes, à quelques pas de la brasserie où nous prenons table ce soir, expliquant soudain: “j’ai une participation dans un fond d’un milliard pour un projet de centrales nucléaires en Syrie. Or, le projet vient de s’effondrer), après quoi je remonte en train pour Lausanne, estomaqué devant le régime zoologique que vivent et tolèrent et justifient, hères masochistes, nos derniers Suisses chenus et claudiquant mais imbus de morale et qui fanfaronnent, ce sont d’ailleurs les seuls que l’on puisse entendre dans ce capharnaüm, les autres espèces exprimant leur être d’importation dans des sabirs tribaux ou des langues écorchées (où l’on distingue mal l’anglais de l’espagnol du français) — bref, j’atterris dans cet état de sidération à Lausanne, quartier sous-gare, emprunte le labyrinthe de parois souples que la Ville a dressé pour accéder à la ville depuis les quais de réception de la gare et me coince dans l’arrière-boutique sans recours ni bière, le frigorifique n’ayant pas été achalandé puisque je suis sur décision de famille (partie suisse) devenu un paria, puisque je suis interdit de parole, puisque je suis coupé des employés lesquels, terrorisés par Monfrère, ont pour ordre de “ne plus me causer”.