Est 8

 

Descente du cours bas de la riv­ière Tara à bord d’un raft. Rive gauche où nous avons mis à l’eau, le Mon­téné­gro, rive opposée la Bosnie. De part et d’autre la forêt prend sur des éboule­ments de roche, mêle ses racines à la pente, tire vers l’échancrure de la gorge. La cime est à cinq cents mètres. Les Polon­ais vont tête nue et debout, chantent et boivent et salu­ent ; nous dou­blons leur embar­ca­tion, pagayons selon les ordres de Vlad, glis­sons sur des rapi­des en cette sai­son tar­dive apaisés. Le long des rives, des instal­la­tions népalais­es et troglodytes, ter­rass­es sur pilo­tis, huttes de bran­chage, bars de bois flot­tés. L’eau est belle, les fonds nets. Nous nav­iguons au-dessus des blocs de gran­it, des troncs pétri­fiés, des galets géants. Entre les rapi­des, des bassins où nag­er. Les pieds devant, le courant vous entraîne. Sans le casque ni le gilet, le bon­heur serait plus grand, mais je ne suis pas Polon­ais, je me tiens sous l’autorité du bar­reur. Au bout d’une heure de pagaie, arrêt côté bosni­aque. Trois cuvettes creusées sur le pas­sage d’une source con­ti­en­nent bières et limon­ades. Nous buvons de la Niksicko avec des Berli­nois et un Espag­nol chevelu pro­fesseur d’université à Madrid. Survi­en­nent les Polon­ais. Tous ont sauté à l’eau : vu leur poids, les remon­ter à pris du temps (le bar­reur attrape les bretelles du gilet de sauve­tage et fait levi­er, mais au-delà des 80 kg, la manœu­vre est hasardeuse). Ruis­se­lants, agi­tant des bouteilles de vod­ka, ils filent vers le prochain rapi­de. L’excursion finit en début d’après-midi, là où la riv­ière change de nom, devient la Rina et entre en Bosnie.