Mois : novembre 2020

Re‑7

 Je reprends espoir.

Outils

Pro­curez-vous des battes de base-ball tant qu’elles sont encore en vente, les drones vont bien­tôt être lâchés dans nos rues.

Re‑6

Usage idiot et révéren­ciel, général dans le peu­ple, autrement dit chez ceux qui en usent, de l’ex­pres­sion “les élites”. Rien de tel pour se con­damn­er à être ce que l’on est: servile devant les déci­sions. N’ou­blions pas: ces indi­vidus qui par l’ef­fet de la pro­pa­gande dis­ent appartenir aux “élites” jus­ti­fient leurs droits (quand ils lestent la pro­pa­gande de quelque action repérable) par les avan­tages cap­i­tal­istes retirés de tech­niques dont la majorité de la pop­u­la­tion mon­di­ale n’a que faire. 

Re‑5

Pas­cal, génie libre, eut opposé à l’hégé­monie de la rai­son, active déjà  en son époque, et celle-là même qui obnu­bile aujour­d’hui les tran­shu­man­istes, la logique du cœur (il dit aus­si “logique de finesse”): elle inscrit dans la nature pro­fonde de l’homme, le défaut, soit l’in­ca­pac­ité de com­pren­dre la totalité. 

Re‑4

Si les corps men­acés par la mise à l’ar­rêt de toutes les pas­sions ne lutte pas — vite — con­tre la mise en place des nou­veaux sché­mas de con­trôle et de com­mande créés par des fous, l’homme tel que nous le con­nais­sions en sera réduit — avant anni­hi­la­tion — à une con­science de lib­erté logée dans un espace intime minus­cule et non-com­mu­ni­ca­ble (cela pour notre généra­tion du XXème siè­cle et une poignée d’heureux épigones déposi­taires de ce qu’il reste de 2000 ans d’hu­man­ité tra­vail­lée les autres indi­vidus étant d’ores et déjà trans­for­més en unités fonctionnelles). 

Re‑3

Les tech­ni­ciens qui délivrent ces jours les mes­sages de ges­tion sociale ont peur. Ils savent qu’ils ignorent tout du bien-fondé des mes­sages qu’ils délivrent, mais les vali­dent de leur exper­tise au nom d’un sys­tème prim­i­tif de délé­ga­tion ascen­dante : je maîtrise ma peur en ados­sant ma respon­s­abil­ité à une respon­s­abil­ité supérieure et hypothé­tique­ment absolue — cela va de soi, inex­is­tante. Nous avons donc affaire à une réac­tion a min­i­ma (con­tre la peur) de tech­ni­ciens qui, en général, “ne pensent pas”. Résul­tat logique: faute de toute logique aus­si bien dans le rap­port mes­sage-réel que dans le rap­port mes­sage-mes­sage, la société entière prend peur.

Re‑2

Le présent dis­paraît plus vite qu’il n’apparaît.

Re-

Cli­mat, nour­ri­t­ure, corps, son, image, il sera tou­jours plus dif­fi­cile d’ac­céder au réel.

Journée mondiale de la fin

Livrez plus de cer­cueils, que l’on enterre tout ceux qui ont peur de mourir!

Vertige

Journée cat­a­strophique. Au-delà de l’église, il y a vingt kilo­mètres d’un parc à touristes aban­don­né. Bassins, mini-clubs, éléphants, pizze­rias, pon­tons. Mais aus­si stades com­plets, aquar­i­ums secs et casi­nos avec leurs plages de faux sable. Je vais seul, à vélo. Ce matin, le mécani­cien m’a ren­du mon engin. Cela a fail­li mal tourné. Je me pointe. Sans masque. Oublié. Le type exige d’être payé. Je lui dis que je vais le frap­per. Il me remet mon vélo. Je tourne dans le patio, je véri­fie. Tou­jours aus­si agres­sif, le gars présente l’ad­di­tion. Quand j’ai payé, il devient toute chose, détaille son inter­ven­tion. Alors je sai­sis: il craig­nait que je je paie pas (Fr. 140.-; un quart de salaire?). Nous nous séparons sans aménités. Il faut que je retourne au Ver­sailles au plus vite, Gala est au lit, malade. Et puis j’ai la fièvre. Je cuis un bouil­lon pour Gala. La bor­de. Emprunte le chemin côti­er à vélo — j’avais com­mencé par là, le parc à touristes. Il s’é­tend au-delà de la ville, après le port. C’est Tch­er­nobyl. Pas un bruit. Reste quelques pau­vres. Ils vivent là, dehors, dans des chais­es pour hand­i­capés. Je m’ar­rête. Quelques squats, quelques pom­pes. A peine la force. Des goé­lands claudiquent dans l’herbe mai­gre, l’air sent l’algue pour­rie. Quand l’on croise un local, cha­cun salue: ras­sur­er l’autre, faire son devoir. Pour­tant, hier le temps était superbe. J’é­tais faible, Gala aus­si, mais nous avons pu nous coor­don­ner pen­dant quelques heures. Et roulé jusqu’à Porec. En voiture, on ne pénètre pas dans la ville. Elle est instal­lée sur une avancée de mer, ville anci­enne, plâtrée, pastelle, roman­tique, en cher­chant romaine. Pour l’am­biance, en ces temps de dépres­sion, nous sommes chez Gior­gio de Chiri­co: vaste décor sans acteurs. Lieu sous­trait au monde. Colon­nades. Silence. Là encore, des goé­lands. Gala com­mande un bouil­lon sur un ter­rasse de café. J’avale deux Lasko. Le soleil tape sur le mar­bre. Nous demeu­rons autour de cette petite table ronde deux heures: s’il passe six per­son­nes, c’est beau­coup. A la fin, j’achète des mar­rons chauds, en face, devant le bâti­ment d’église (même prix qu’à Chaud­eron-Lau­sanne, je com­prends pas). Puis nous reprenons la route de la côte. Alors que tout est telle­ment beau, terre grasse rouge sang, églantiers, vig­no­bles, man­darines, pommes, nuages. Plus tard, en cui­sine, la notre, nous gril­lons une viande de bœuf, la meilleure, ou plutôt, la plus chère, choisie à l’é­tal du bouch­er (les autres clients, les yeux ronds de gour­man­dise nous envi­aient de pou­voir dépenser ce prix): à la pre­mière bouchée, j’ai fait “donne-ça au clebs de la place!”. Et ce matin, Gala est malade, blanche, tombante, et se lamente et tombe.