Jours tranquilles

Val­lée de Conch­es, dans l’ap­parte­ment de Blitzin­gen, avec de la musique et des palettes de bière. Le matin, prom­e­nade sur les bor­ds du Rhône. Les juments galopent, les oies s’en­fuient, se retour­nent, cac­ar­dent. Les prés qui entourent Bod­men pro­duisent une herbe rase d’aspect velouté. Ensuite, prise de nou­velles (pro­grès des mesures total­i­taires), suivi de l’ef­froi quo­ti­di­en. N’é­tait-ce le prix de la nuitée, je resterais dans ce chalet, ma chope à la main, à regarder par la fenêtre de la cui­sine le voisin broy­er les plantes de son potager, pré­par­er les sil­lons et affer­mir sa bar­rière. A la tombée du jour, il bâche sa voiture, retire son bon­net, se couche. Le lende­main, lorsque nous met­tons en marche le café, autour de midi, il a déjà abat­tu la moitié de son tra­vail. Homme âgé, ralen­ti, sage, qui occupe le temps, vit et survit, il est l’ac­teur soli­taire d’un con­te moral. Com­ment faire mieux en ces heures ? Et surtout, que faire d’autre? Ce voisin a rai­son: il cir­cule dans son jardin, offi­cie autour de sa mai­son, appro­fon­dit un rit­uel, patiente, attend, peut-être qu’il espère. Pas mon cas. L’ac­tion folle de la poignée de cor­rom­pus qui a usurpé les posi­tions de pou­voir ne peut s’ar­rêter sans casse. Encore deux nuits à pass­er dans la mon­tagne. Avec Gala, nous spécu­lons sur l’après. Nous retournerons en Croat­ie ou nous irons à Agrabuey. Mer­cre­di, nos pan­tins nationaux, nos pré­somptueux, vont ‑dit-on- impos­er le masque dans les rues. Cette con­trainte — je me le suis promis — jamais je ne l’ac­cepterai. La lim­ite est atteinte.