Itinéraire splendide à travers la Serranía de Cuenca. Paysages de Laponie. Grands sapins en chandelles, soue les frondaisons terres basses et ombreuses, une série de canyons, des défilés, des reliefs sauvages et austères qui évoquent le Haut-Jura. A midi, menu à Carboneras de Guadalzón, à l’auberge El Pilar où le patron et sa famille, malgré l’abondance de la clientèle ce samedi, me réservent un accueil des plus chaleureux, gardant mon vélo au garage, venant deux fois à ma table s’inquiéter de savoir si les plats conviennent, puis me raccompagnent. Comme d’habitude, alors que la contrée dort, je roule. C’est beau. Grand. Très grand. Et vide. Fin d’après-midi, j’atteins Cañete, entre le parc naturel de Cuenca et Teruel, l’endroit le moins peuplé de la péninsule. Un cavalier dresse son cheval au pied de l’ancienne forteresse. Sous les colombages de la place majeure, quelques chaises, un bar. Alignés contre le mur pour échapper au soleil, deux couples parlent du temps, de la chaleur, et du temps et de la chaleur. Le monsieur qui tient son téléphone devant lui passe en boucle la musique de Sergio Leone pour Le bon, la brute et le truand.
-Désolé, me dit le patron, pas de second service, je ne devrais même pas être là, je ne fais que passer, il y a une fête au village voisin, il faut que j’y aille.
Autre bar, assis à même la rue, je fais comme le vieux couple ivre, crasseux, en poitrine, en moustaches, en bandana et rouflaquettes, qui arbore des T‑shirt Motörhead et s’extasie sur ce titre sans puissance qui a fait le succès de Metallica “One”, je salue toute personne qui passe (trois en en une heure dont la femme du patron du bar). Pas de nouvelles de Gala. J’appelle. Je rappelle. Après ce qu’elle a raconté hier.