Notes de voyage — 6

Itinéraire splen­dide à tra­vers la Ser­ranía de Cuen­ca. Paysages de Laponie. Grands sap­ins en chan­delles, soue les frondaisons ter­res bass­es et ombreuses, une série de canyons, des défilés, des reliefs sauvages et austères qui évo­quent le Haut-Jura. A midi, menu à Car­bon­eras de Guadalzón, à l’auberge El Pilar où le patron et sa famille, mal­gré l’abon­dance de la clien­tèle ce same­di, me réser­vent un accueil des plus chaleureux, gar­dant mon vélo au garage, venant deux fois à ma table s’in­quiéter de savoir si les plats con­vi­en­nent, puis me rac­com­pa­g­nent. Comme d’habi­tude, alors que la con­trée dort, je roule. C’est beau. Grand. Très grand. Et vide. Fin d’après-midi, j’at­teins Cañete, entre le parc naturel de Cuen­ca et Teru­el, l’en­droit le moins peu­plé de la pénin­sule. Un cav­a­lier dresse son cheval  au pied de l’an­ci­enne forter­esse. Sous les colom­bages de la place majeure, quelques chais­es, un bar. Alignés con­tre le mur pour échap­per au soleil, deux cou­ples par­lent du temps, de la chaleur, et du temps et de la chaleur. Le mon­sieur qui tient son télé­phone devant lui passe en boucle la musique de Ser­gio Leone pour Le bon, la brute et le truand.
-Désolé, me dit le patron, pas de sec­ond ser­vice, je ne devrais même pas être là, je ne fais que pass­er, il y a une fête au vil­lage voisin, il faut que j’y aille.
Autre bar, assis à même la rue, je fais comme le vieux cou­ple ivre, crasseux, en poitrine, en mous­tach­es, en ban­dana et rou­fla­que­ttes, qui arbore des T‑shirt Motör­head et s’ex­tasie sur ce titre sans puis­sance qui a fait le suc­cès de Metal­li­ca “One”, je salue toute per­son­ne qui passe (trois en en une heure dont la femme du patron du bar). Pas de nou­velles de Gala. J’ap­pelle. Je rap­pelle. Après ce qu’elle a racon­té hier.