Enfin à l’âge où je vais faire ma chambre d’adolescent; pour mon grand bonheur, certaines passions retardées sont toujours vives — les mains suffisent. Quand mes enfants quitteront le domicile, je vais illustrer une pièce. Cette pièce sera dédiée à la mémoire travailleuse. Elle fonctionnera comme une extension de la personnalité, pièce que je dénomme adolescente car elle permet à celui qui l’occupe de visualiser ses choix, ou jalons ou obsessions, après accrochage contre les parois de la chambre (une pièce devient chambre après soin). Ces accrochés sont autant de rappels, de volontés, de prétentions que l’on a tout loisir de raisonner sous forme de catégories. Donc je suspendrai, organiserai, accrocherai, dans le désordre, à force de clous, sur les verticales, afin que survienne dans le cours de la contemplation un ordre, mes livres, mes haches, mon matériel de vélo, mes tableaux religieux, ma collection de cailloux, mes vingt-trois Casio, mes cordes à sauter, mes skateboards, trois encyclopédies, une pile de carnets vierges.
Mois : décembre 2018
Garde
L’organisme dont nous avions la garde avait été saisi dans un quartier secondaire au début du couvre-feu. La police du périmètre avait rempli la fiche sans aucun soin de sorte que ma femme et moi, seuls vigiles affectés pour la surveillance de nuit, nous préparâmes à faire face à toutes les éventualités.
Chat
Mon marchand de dentifrice, de shampoing, de savon et de parfum a un chat. Il est noir. Il a les yeux jaunes comme souvent les chats noirs. J’ai pour lui une grande sympathie car il ne sort pas du laboratoire. C’est un animal véritable, biologique. Produit par deux chats. Entouré de chiens miniatures, drogués, aboyeurs, fous et coiffés que leurs propriétaires manipulent, cajolent, exhibent persuadés d’avoir entre les mains des homuncules, ce chat véritable se réfugie sous le triangle publicitaire de son maître savonnier et, royal, assiste au cirque.
Patates
L’habileté à conduit les marchands de patates à créer des variétés spéciales. Nous avons ainsi des pommes de terre « à frire », des pommes de terre « vapeur », des pommes de terre « spéciales mets au fromage » ou encore des pommes de terre « à gratin ». Et depuis peu une nouvelle variété, des pommes de terre « tous usages ».
Actes d’antimondialisation 2
Plusieurs années, j’ai cherché à comprendre quels intérêts servait l’importation massive dans nos sociétés d’énergumènes du tiers-monde marqués au sceau de la religiosité, arriérés et aculturés (ne possédant aucune culture, ni la leur ni la nôtre). Les données du problème apparaissaient contradictoires et irréconciliables. Détruire la démocratie, certes. User de l’islam comme outil indirect d’oppression, soit. Augmenter le nombre de fonctionnaires à proportion du nombre d’énergumènes assistés afin de renforcer l’Etat, bien. Mais en fin de compte, je ne voyais là – pour le pouvoir – que des calculs à court terme, et le pouvoir, c’est bien connu, n’a qu’une visée : la pérennité. A Florence, j’ai observé l’une de ces compagnies de la nouvelle économie qui fleurissent dans nos villes. En l’occurrence, un système de livraison de repas à domicile, à vélo, postes occupés par des immigrés loqueteux qui dorment dans la rue et survivent grâce à l’aide sociale (on ferait les mêmes observations en se penchant sur ces entreprises commerciales entre toutes néfastes que son Uber, Airbnb ou Glovo). Car il suffit pour se figurer pleinement l’usage des énergumènes dans notre système postlibéral d’abandonner toute référence politique. Nous ne vivons pas dans des sociétés qui organisent entre les citoyens des rapports politiques, nous vivons dans une entreprise fonctionnant à l’échelle mondiale qui organise entre ses employés un système de redistribution de l’argent du bas vers le haut.