Dans la salle communale, autour de longues tables, nous mangeons avec cinquante villageois le “cordero a la pastora”, l’agneau que tue le berger avant de descendre de l’alpage, morceaux comme tronçonnés — plat sans apprêt, impossible à présenter en restaurant — puis bouillis en marmite avec des pommes de terre. Chacun apporte son assiette, le vin est partagé, de même que les desserts, gâteaux de noix, beignets, pêches alcoolisées. Gala monte chercher une bouteille. Je lui fais prendre la meilleure. Elle est de la même cave que celle que j’ai apportée en mai pendant les journées de cueillette des champignons. Ce jour-là, le vin était passé. Je m’en excusais. Voilà qui se reproduit. Pourtant, la veille, Gala et moi avons ouvert une bouteille de la même étiquette. Je venais de lui raconter l’incident, mais non, le vin était excellent. Aussi me vois-je condamné à rapporter les mêmes circonstances qu’au mois de mai, l’air contrit, ne sachant si l’on me croira pour la deuxième fois: “j’ai pris ce vin à Barabastro, l’été il est resté dans le salon, oui, il y fait chaud, non il n’était pas au soleil…” Et chacun de se passer le verre, de juger le rouge excellent, mais un peu tourné — décidément!