Prochaine génération

Le voisin, habi­tant réguli­er de la ville, a bâti dans son jardin une piscine de la taille de deux baig­noires. En début de semaine, le grand-père cou­vre l’eau, enclenche le dépu­ra­teur et coupe les ban­des her­borisées. Le ven­dre­di, sa femme bal­aie les dalles. Same­di matin, le cou­ple de retraités débâche et entoure la piscine de son néces­saire: chais­es, tablette, para­sol. Enfin, arrive leur fils et son enfant, une fille de six ans, cheveux courts, en sur­poids, cri­arde. Elle entre dans l’eau, bar­bote sous le regard pro­tecteur de la famille. Celle-ci, dis­tribuée autour du bassin, répond à ses moin­dres caprices. Les pleurs et les cris indiquent assez son niveau d’ex­i­gence; aux­quels les par­ents, béats, se plient. L’a­mu­sant est que dehors, dans cette société qui déjà tend les bras à la gamine choyée comme une princesse de Mahara­ja — nous sommes en Espagne — il n’y a pas de tra­vail, pas d’ar­gent, donc aucune pos­si­bil­ité de de con­stru­ire une vie dans l’or­dre du désir et que, dès main­tenant, plus de la moitié des demi-adultes de vingt, trente, par­fois trente-cinq ans, ne sub­sis­tent que grâce au sec­ours de la famille.