Maillon paléontologique

Pour être tombé hier sur le cliché d’il­lus­tra­tion d’un fait divers infor­mant de l’at­taque d’un cueilleur de palmes par trois éléphants sauvages d’Asie (trois pachy­der­mes aux oreilles bat­tantes broutent la savane), je rêve que l’on m’établit sur un pont de pierre datant d’un époque antéhis­torique en vig­ile de la nais­sance de l’hu­man­ité. Défi­lent alors sur le para­pet des créa­tures mi-humaines mi-bes­tiales en un cortège à voca­tion paléon­tologique qui se donne pour tâche de me racon­ter, con­tre l’en­seigne­ment de l’a­cadémie, la véri­ta­ble orig­ine du monde. Ma fas­ci­na­tion est telle qu’elle exclut d’emblée toute peur, ce que je fais savoir, par delà les siè­cles à mes con­génères, les encour­ageant à regarder la vidéo de ces fran­chisse­ments de pont s’ils veu­lent décou­vrir la vérité. Eux se résis­tent. Le doc­u­ment en main, je les pour­su­is, les har­cèle.
-Il faut voir ça, il le faut!
De retour sur le pont, une dernière espèce, com­posée de géants à l’ab­domen bal­lon­né, annon­cent qu’ils vont me percer les yeux. Ils enfon­cent trois fois une aigu­ille sous le niveau de la paupière, tan­dis que, les yeux clos, je vois la pointe métallique pénétr­er ma chair.