Wohlen

Sur le quai, trente per­son­nes — je viens de compter. Pas une ne par­le. Un train de marchan­dis­es s’en­gouf­fre. Long effet. Pour le pre­mière fois — peut-être en rai­son de l’am­biance funèbre — je sens le poids d’un tel con­voi. Je fixe la plate­forme, puis remonte le long des piliers et regarde trem­bler le toit. La tenue du bâti m’é­tonne. Peu après, sec­ond trans­port. Un fra­cas con­sid­érable. Quelle pré­ci­sion pour aigu­iller un aus­si grand nom­bre de wag­ons pleins! Quelle maîtrise! Déjà, en arrivant en voiture dans ces faubourgs de Zurich, je me dis­ais: voilà la richesse de la Suisse. Des hommes et des femmes qui tra­vail­lent. Le région­al pour Lenzburg tarde vingt min­utes à entr­er en gare. Au même rythme, jeunes et vieux pren­nent place. Nous tra­ver­sons une cam­pagne déclassée. Hangars, bureaux, usines sont posés sur le plat comme autant de par­al­lélépipèdes. Ici et là, sur la hau­teur, un vieux château, une auberge où boire le ven­dre­di. Des feux en grande quan­tité, les auto­mo­bilistes atten­dent. Tout à l’heure, pour faire de la con­ver­sa­tion, l’employé de chez Dodge qui me con­dui­sait à la gare me dit: “Moi, c’est le moteur. Moto ou voiture. Quand je suis en forme, je roule d’une traite jusqu’au Por­tu­gal. Mais le train, jamais.”