Film

Manip­u­lant pour la pre­mière fois cette caméra que j’ai achetée il y a un an pour filmer les rues de Mala­ga. Elle était sur la bib­lio­thèque du salon, dans son car­ton, je repous­sais sans cesse le moment de la déballer. Et voilà que le temps presse. Le mode d’emploi est court. Je l’ai lu. Un bou­ton pour allumer, un autre pour étein­dre. Manolo, le coif­feur, dit qu’il me prêtera un pro­gramme de mon­tage. Quand il ne coupe pas les cheveux, il se balade en mon­tagne sur sa moto de sept cent kilos et filme. Moi, je marcherai une soix­an­taine d’heures. Et aus­sitôt sur­gis­sent les prob­lèmes. Com­bi­en de bat­ter­ies faut-il? Quelle mémoire? Et la nuit, com­ment filmer? Ce matin, je suis allé au marché de Bena­gal­bón. Le gitan m’a ven­du un gilet à poches. Si j’ob­tiens un pied, je le vis­serai sous la caméra et il vien­dra s’ap­puy­er dans la poche de poitrine. La caméra devrait alors se trou­ver sur l’é­paule. Il fau­dra l’im­mo­bilis­er. Je n’imag­ine pas tenir la main en l’air pen­dant soix­ante heures. Ensuite, il fau­dra un micro. Manolo m’ex­plique que les micros inté­grés font enten­dre le bruit du vent. Heureuse­ment, je fais un film lit­téraire (l’élé­ment le plus impor­tant n’est pas l’image).