Parti marcher ce matin sur le versant ouest du ruisseau Cortinez. De nuit, la neige a vitrifié les épineux. Sans le bâton de berger, les taillis eussent empêcher mon passage. Je me faufilais, je retenais les branches, je plaquais les touffes pour éviter que la ronce ne déchire ma veste. Les toits du village sont apparus; ils fumaient dans la combe. Auréolé de brume, le sommet des Blancas se détachait contre le ciel. Avec le réchauffement, je commençais à avoir de peine à avancer, les plaques de glace cédaient, libérée, l’eau qui roule sous les surfaces dévalait les pentes. J’allais rebrousser chemin, quand j’ai découvert une maison de pierre. En fait, moins une maison qu’une sorte de cabane, mais il y avait tout de même, à distance, sous une bâche de plastique, une parabole. Je connaissais les dernières constructions alignées sur le lit du Cortinez, à l’endroit où il rejoint le Lubierre, mais j’ignorais qu’un audacieux avait poussé plus loin, qu’il avait même bâti un pont — j’ai voulu le rejoindre, mais le mur de pierre sèche de cette propriété de fortune ouvrait sur un tel désordre de taille que j’ai renoncé, je suis retourné à Agrabuey. Ce faisant, j’ai voulu changer de berge et j’ai trouvé un trou d’eau parfait, bleu glace, bien alimenté, où nous pourrons, si le débit se maintient, nous plonger avec les enfants cet été.