Montreux

Cette année, j’ai payé. Sang pris, sang analysé, colo­scopie, abla­tion, pres­sion; arrivé au mois de décem­bre, je vois que l’as­sureur n’a pas sor­ti un franc. Donc, j’an­ticipe. Et je prends ren­dez-vous chez le der­ma­to­logue. J’ai ces mar­ques rouges et brunes le long du cou, comme des flammes sur un réser­voir de Harley-David­son. L’as­sureur pay­era. De même pour ce bou­ton qui émarge à gauche du nez. Et quelques autres con­seils, dont celui-ci:
-Doc­teur, je me grat­te.
-Vous vous grat­tez? Com­ment?
-Le jour et la nuit. Surtout la nuit. Aux par­ties, au torse, aux jambes. Les cheveux aus­si, je veux dire la tête.
-Mm.
Le cab­i­net donne sur le lac Léman, les cygnes opèrent dans les nuages. Tout de blanc vêtu, attablé devant un bureau blanc, le der­ma­to­logue finit de rem­plir la fiche puis donne son avis de spé­cial­iste:
-Pour les rougeurs sur le cou, on ne peut rien faire. On pour­rait, mais il y a peu de chances que ça marche. Bref, le mieux est de ne rien faire. Pour le bou­ton, si cela ne vous gêne pas, le mieux est de le l’ou­bli­er. Si je le brûle, vous aurez une brûlure à la place du bou­ton. Enfin, pour ce qui est de se grat­ter, con­tin­uez de vous grat­ter. Du moins si ce n’est pas insup­port­able. C’est une réac­tion nor­male de se gratter.