Installé sur la terrasse, je considérais mes pieds. C’est une partie de l’homme que je n’aime pas. Esthétiquement secondaire, elle évoque l’ascendance reptilienne. Tout au plus dans la relation sexuelle ou dans l’évocation de la force, course, marche, stabilité. Voyant ces appendices, je songeais à cette fille encore nubile avec qui je fais du sport : elle a les pieds fins, blancs et menus. Sans beauté mais jeunes. Vivaces. Frais. Sur cette terrasse, dans la lumière orange du crépuscule, je regardais particulièrement mon pied gauche. Aux qualités bien réparties, conformé, blanc, rose, la plante cornée, un pied sain. L’autre, atteint par les accidents. Pouce meurtri, recousu ; par expansion la chair a jauni. Voici les coups, les marques, les meurtrissures du temps. Reçues, elles demeurent. Ce pied avec ses stigmates renvoyait à toutes les occurrences de l’âge, les accidents survenus datent le corps, le mien, les autres, créant sous le regard une sorte de catalogue des vivants, de leur origine et de leur destination.