Saint-Gaudens

Étape à Saint-Gau­dens. Le genre de bour­gade qui donne froid dans le dos. Sen­ti­ment que les habi­tants se bar­ri­ca­dent dès la tombée de la nuit. Ou qu’ils n’ont pas l’ar­gent pour sor­tir. Reste les ombres et autour de bistrots qui ressem­blent à des ver­rues quelques piliers de bars dont les voix réson­nent sur des places vides. Nous mar­chons. Der­rière le chœur de l’église, deux ter­rass­es. Elles sont grandes, elles sont désertes. Dans son bock, la bière a un goût cit­ron­né. A dire vrai, c’est imbuvable. Mais la patronne est gen­tille. Nous nous taisons, nous admirons la vue: une usine énorme  aux dépen­dances galac­tiques. La suite de la soirée remet la France à la place qu’elle mérite d’oc­cu­per. Nous dînons à l’hô­tel du Com­merce. La salle est comble. Le repas déli­cieux. En entrée, Gala com­mande des huîtres, je con­tin­ue avec un cas­soulet. Der­rière, une table de vingt jeunes hommes en cos­tume. Un sémi­naire d’en­tre­prise. Le chef tente de diriger la con­ver­sa­tion sur ces chantiers que sont l’in­no­va­tion, le mar­ket­ing, la prospec­tive et le pro­duit, mais les intéress­es n’ont qu’un sujet, le rug­by: ils par­lent points, tac­tiques, rachat de joueurs et tournois. Arrivé au dessert, un café assor­ti de sept pâtis­series, je cale. Les nuits sous tente dans les Grisons, où je suis par­ti avec un sac pre­mier prix trou­vé dans l’ar­moire du mag­a­sin, me revi­en­nent en plein vis­age: j’ai pris froid. Le vin aidant, j’ai à la place du nez un bou­chon et respire par la bouche.