Gide-Green

De tout, Gide fai­sait lit­téra­ture. Son jour­nal en témoigne. En 1900, quand il démis­sionne de son poste de maire de la Roque-Bag­nard, com­mune où il pos­sé­dait un château, il cisèle ses phras­es pour dire le peu de goût qu’il a de la fonc­tion poli­tique (un habi­tant de sa com­mune ren­con­tré à Caen le mois dernier m’a fait lire la note qu’il avait prise à ce sujet). Le drame de sa vie, l’amour pour sa cou­sine Madeleine, con­quête impos­si­ble aboutis­sant à des fiançailles quinze ans après les pre­mières séduc­tions, tra­verse toute l’œuvre. Lorsqu’il voy­age en Algérie, il racon­te ses aven­tures quo­ti­di­ennes avec des garçons des ruelles de Biskra. Elles lui vau­dront d’être surnom­mé “le démon de seize heures”. A son hon­neur encore, la rédac­tion (freinée par l’en­tourage intel­lectuel qui con­fine la pub­li­ca­tion à un cer­cle restreint — longtemps ne seront livrés au pub­lic que deux chapitres de l’es­sai) du Cory­don, défense philosophique de l’ho­mo­sex­u­al­ité dans laque­lle Gide con­jugue pudeur et mil­i­tan­tisme. De façon générale, son approche lit­téraire de la vie mon­tre un esprit en quête per­ma­nente de vérité et capa­ble de l’af­fron­ter aus­si bien dans les choses intimes que dans les cir­con­stances publiques. Atti­tude que l’on peut oppos­er à celle d’un Julien Green qui dans les mil­liers de pages que compte son jour­nal expose les débats de con­science d’une âme aux prise avec Dieu sans jamais dire un mot de son homosexualité.