Seia

Belle fin d’é­tape sur des routes cham­pêtres bor­dées de pier­res sèch­es. Il a même arrêté de pleu­voir (pen­dant une heure). Seia se dresse à flanc de mon­tagne. La seule sta­tion de ski du Por­tu­gal, dit Javier. On devine du rocher sur les hau­teurs, mais les bancs de brouil­lard empêchent d’en dire plus. Soudain un petit train touris­tique sur­git d’un nuage de pluie. Il est plein. N’est-ce pas extra­or­di­naire? On annonce à des touristes qu’ils peu­vent se réjouir: là où on les emmène, il n’y a rien à voir. Et ils se réjouis­sent. Il y a tou­jours quelque chose à racon­ter, n’est-ce pas? Heureuse­ment, les cloches son­nent. Javier a bien fait les choses. Quant on est détrem­pé, refroi­di, quant on roule depuis des heures, on se racon­te des blagues pour se don­ner du courage, pour avancer, pour finir l’é­tape. Nous abor­dons le dernier kilo­mètre du jour sur le petit plateau. Javi manque l’hô­tel, il faut redescen­dre. Un groupe de Français occupe la récep­tion de l’hô­tel. Les touristes du petit train. Quelle agence de ban­lieue a bien pu leur ven­dre Seia? Des immeubles de 1970 empilés en ter­rasse, des mag­a­sins de sport qui vendent des luges chi­nois­es, du riz cassé et des patates, de la morue et de l’eau sous toute les formes: soupe, pluie, ruis­seau, flaques. Je cor­rige: nous dînons dans un bon restau­rant. Les morceaux de viande sont ras­sis, les patates braisées, la salade verte. Qua­tre serveurs dis­cu­tent les résul­tats du foot­ball, le maître d’hô­tel fait l’ar­ti­cle en trois langues et il y a deux femmes en cui­sine. Or, nous sommes les seuls clients. Com­bi­en ces gens peu­vent-ils gag­n­er? Pour demain, Javier annonce l’é­tape la plus dure de la course. Elle com­mence par 28 kilo­mètres de mon­tée.
- Pour com­mencer, il y a 500 mètres de descente, plaisante Javi.