Fin de partie

“Rien lu” égale “il a tout a écrit”, dis­ais-je, “voilà un exem­ple type d’équa­tion”. Accélérant le pas pour échap­per à mon inter­locu­teur, je me représente alors l’œuvre com­plète de l’au­teur et le fait que j’ig­nore tout de lui à part son nom, quand mon pour­suiv­ant me con­traint à pénétr­er dans un apparte­ment. Il m’in­stalle dans un salon, m’an­nonce la venue d’un spé­cial­iste d’archéolo­gie, de lit­téra­ture et de crim­i­nal­is­tique.  Or, ce pro­fesseur émi­nent n’est autre que l’élève pédant qui, en 1986, pour le pas­sage des exa­m­ens de philoso­phie m’a recom­mandé la lec­ture des Hypo­ty­pos­es pyroni­ennes de Sex­tus Empir­i­cus. “Ce type est une far­felu!”, fais-je val­oir. Aus­sitôt, l’on me recon­duit dans la rue où je décou­vre mes meubles et objets per­son­nels. Je lève les yeux  en direc­tion de la façade de l’im­meu­ble. Au deux­ième étage, ma femme s’ac­tive dans notre apparte­ment. Entouré de mes amis et de la famille mon inter­locu­teur déclare:
- Tu es fou!
- Je sais.
- Ce n’est pas tout, tu es alcoolique!
Je réfléchis. Me rends compte que c’est vrai. Cherche à com­pren­dre les con­séquences. Les amis répé­tent l’ac­cu­sa­tion.
-  Fou et alcoolique!
- D’abord, dis-je pour me défendre, tout le monde boit. Ensuite, je ne bois pas plus qu’un autre… Et troisième­ment…
- Troisième­ment?
- Je ne sais plus.
- Tu vois! C’est l’al­cool!
- Tout le monde peut avoir une perte de mémoire, non?