Kuala Lumpur, autour de minuit, dans un restaurant poche de l’aéroport. Marco, le chilien qui enseigne aux enfants musulmans de la côté est, dans la région de Khota Barhu, nous raconte qu’il a préparé un repas mexicain pour les les élèves de sa femme, de futures professeurs d’anglais. Celles-ci passent le nez sur les plats. S’enquièrent: cette nouriture est-elle halal?
- Comment ne le serait-elle pas, s’exclame Marco, tous les produits viennent du marché qui se tient place de la mosquée!
Cependant, nous dit-il, elles étaient gênées, tardaient à finir leur limonades, louvoyaient. La plus courageuse expliquera: si la nourriture n’a pas été cuisinée par un musulman, lequel devra en outre prononcer la prière idoine, elles ne peuvent pas la consommer.
La femme de Marco, une Américaine qui arrive à l’instant de Londres où elle passait un entretien pour un poste de formatrice à Dubai, fait un signe d’impuissance.
- L’examen final d’anglais est noté sur cent questions. Pour réussir, il faut répondre correctement à six d’entre elles. La moitié des candidats échoue. Tous sont reçus. A défaut, les subventions étrangères seraient coupées. Et puis, c’est dans la mentalité: il faut sauver les apparences.
Là-dessus, je commande l’addition. Il va être une heure du matin, notre avion décolle à 7h30. Nous avons beau dormir “en bout de piste”, comme nous l’a confirmé Marco, lequel fréquente régulièrement l’hôtel, la navette doit aller prendre un virage à vingt minutes d’ici de sorte que nous avons affaire à ce paradoxe: l’établissement le plus proche de l’aéroport est aussi l’un des plus éloignés. Je demande à payer, disais-je. La serveuse n’a pas séparé le repas du couple et le notre. Marco coche leurs plats, je coche les nôtres. Nous reviennent deux additions. La mienne, fantaisiste. J’indique au moyen des coches ce que nous avons consommé. L’addition repart. Et revient, tout aussi fantaisiste. Mais cette fois, de moitié inférieure à la commande réelle. Je paie.