Au perroquet vert.

Sous tente à Kreu­zlin­gen, après un tour du lac de Con­stance à vélo, j’imag­ine écrire quelques lignes, mais il pleut, je me couche, j’é­coute la pluie tam­bouriner sur la toile. C’est l’été. De retour sur le Guintzet, je trou­ve un point de départ pour le texte: ce gros ado­les­cent à qui le vendeur chi­nois du mag­a­sin d’armes de Con­stance refu­sait de ven­dre une machette alors que lui et son col­lègue alig­naient devant moi des bâtons tech­niques de toute taille et de tous poids. Au terme de quelques heures d’écri­t­ure inspirées, l’aven­ture du per­son­nage prin­ci­pale de ce texte, un rédac­teur de guides de voy­ages man­daté par la société d’édi­tions Panoram­i­ca, se ter­mine sur les con­tre­forts du lac, dans une resserre de la brasserie Rup­pe­nau. J’im­prime le texte, dont je suis con­tent: con­tent parce que je ne l’ai pas vu venir, que je doutais pou­voir écrire un texte aus­si enlevé et doute pou­voir en écrire un autre. Par ami­tié mais égale­ment pour avoir son avis, après avoir ajouté un épigraphe tiré de Paludes  (“-J’écris Paludes. André Gide, Paludes”), je mets le texte sous pli et l’ex­pédie à un édi­teur. Or, hier, me voici à Bienne, Au per­ro­quet vert, en sa com­pag­nie. Il y a longtemps que nous devions dîn­er. Je pen­sais être reçu à son domi­cile, j’avais donc annon­cé Gala. J’ar­rive seul et en cat­a­stro­phe. Selon mon habi­tude, j’ai peiné à tra­vers ce See­land dont la car­togra­phie a tout du palimpses­te (aux envions de Bel­le­chas­se et du Vul­ly). Nous com­man­dons une salade de carottes rouge, une entrecôte, de la Box­er et un vin, j’an­nonce à l’édi­teur que je vais par­tir aux Moluques, il me donne sa vision des dan­gers qui guet­tent la société et après le plat de résis­tance tire de sa servi­ette le man­u­scrit qu’il traite déjà comme un livre.