Lukàcs

A Budapest, pen­dant les trois années où je pas­sais du temps dans cette ville, une vit­rine exhibait face à la gare un vol­ume pous­siéreux de l’Esthé­tique de Györ­gy Lukàcs. Le quarti­er n’est pas touris­tique. Le Danube est loin, nous sommes près d’un car­refour encom­bré de bus, de camions etau-dessus d’un trot­toir ser­ré où les pas­sants ne s’at­tar­dent pas. D’ailleurs je n’ai jamais su si une librairie se cachait der­rière cette vit­rine. Je ne me le suis pas demandé. M’in­ter­roger sur la présence d’un vol­ume de Lukàcs en ce lieu me suff­i­sait. Qui l’avait mis là? A en juger par son état, il repo­sait dans cette vit­rine depuis des années. Et pourquoi seul? En face, les trains à l’ar­rêt, der­rière la façade de la gare, tout en verre opaque et poutrelles métalliques. Je me sou­viens de la com­mu­ni­ca­tion la même année de la sta­tis­tique des sui­cides. La Hon­grie était le pays où l’on se sui­cidait le plus au monde. A cet endroit, entre la vit­rine et la gare, cela me parais­sait évident.