Course

Des navettes bondées achem­i­nent sur la ligne de départ des coureurs por­tant le dos­sard. Je me représente ce trans­port, cette foule, et cela me paraît absurde. Puis je m’en­dors. A neuf heures le lende­main, je quitte les enfants vêtu court, le front ceint d’un tis­su, le chronomètre au poignet. De la gare des bus de Fri­bourg, la navette me dépose dans la Grand-rue de Morat. Le coup de pis­to­let reten­tit, la course com­mence, agréable, par temps doux, au milieu de haies de spec­ta­teurs qui applaud­is­sent et agi­tent des cloches. Je vais à mon rythme, qui est moyen, et réfléchis aux prob­lèmes que sus­cite l’écri­t­ure d’Aca­blar. Or, chaque fois je trou­ve une idée, il se pro­duit comme un appel d’air, ma foulée grandit. Puis je reviens à la nor­male, jusqu’à l’idée suiv­ante. Alors, à nou­veau, j’ac­célère. Et ain­si de suite. Devant Fri­bourg, à l’ap­proche de la porte de Morat, j’aperçois une arche gon­flable  mar­quée Arrivée. Aus­sitôt, je m’élance, dou­ble les autres con­cur­rents, passe sous l’arche, m’ar­rête. Et con­state que la course n’est pas finie, que seul entre tous j’ai accéléré, que la mon­tée de la rue des Alpes est devant nous. Le soir un bénév­ole me dira:
- J’ ai fait sig­nalé  l’er­reur à l’or­gan­i­sa­tion, mais ils n’ont en pas tenu compte. Enfin, l’essen­tiel est que cela n’ait gêné personne.