Plaque commémorative apposée contre un immeuble de la Rykestrasse. Les nazis, responsables à cet endroit d’un assassinat, sont nommés “bandits fascistes”.
Mois : juillet 2013
L’avionnette tombe
L’avionnette tombe. Nous sautons. Mon père tire sur son parachute. Nous l’imitons et flottons à sa suite dans un ciel limpide. Au milieu des champs, la voiture de mon frère. Le coffre contient un arsenal: pistolets, fusils, fusils-mitrailleurs, caisses de cartouches.
- Tu devrais refermer ça, dis-je.
- Mais enfin, on a plus le droit d’être armé!
Soudain une autre voiture. Un inconnu en sort, ouvre son coffre et dévoile une autre quantité d’armes. Nous sommes sur un marché clandestin. Plus tard, lorsque les vendeurs quittent la place, nous remontons dans l’avionnette. Même scène. Elle tombe. Nous descendons en parachute. Mais cette fois, surgit un garde civil, puis d’autres: c’est une embuscade. Je lève les yeux. Mon frère est accroché dans l’arbre, je les baisse, mon père s’est tranché la gorge. Il s’enfonce dans la terre. Je me rends. Ma mère descend du ciel, inspecte la scène.
- Papa ne nous dira plus rien. Tout de même quelqu’un d’étrange, et qui disparaît avec son mystère.
Les militaires posent les fusils. Mon père mort, plus de danger. Le garde civil me tend une bouteille d’eau. Je tire de la terre sablonneuse mes deux enfants, les lave et mets de l’eau dans leur bouche. Maintenant que “tout est fini”, je les rappelle à la vie.
Magellan
Magellan, nous dit Stefan Zweig, emportait dans les soutes de ses galions des boucliers, des piques, des mortiers et si la rencontre devait être pacifique, afin de commercer avec les sauvages, des calottes, des clochettes, des miroirs. Ces miroirs arrivèrent en grande partie brisés sur le nouveau continent, mais ils permirent aux indigènes de contempler pour la première fois leur visage. Etonnante découverte de soi et de l’autre. J’imagine tel homme qui venant de s’apercevoir porte sur la femme qui lui est attachée une regard changé.
Kreuzberg
Chez un ami traducteur dans le quartier de Kreuzberg. Les présentations ont lieu dans le couloir. Sur le radiateur, une photographie de bonne taille montre un groupe d’adultes, portrait d’entreprise ou réunion de famille, cliché provenant j’imagine de la brocante.
- Tiens regarde, on dirait papa, dit Luv.
Aplo acquiesce.
Gala se penche.
- Pas du tout!
Debout, de noir vêtu, encravaté, un homme au crâne lisse, au faciès arrondi dont on devine qu’il porte au quotidien le melon.