Après trois heures à pédaler

Après trois heures à pédaler dans les cail­loux d’un chemin qui longe l’an­ci­enne voie de chemin de fer nous atteignons le col de Valde­man­co. L’auberge tient des salles de fête pour noces de mariage. Pas de menu affiché, le garçon le récite à notre table. Nous buvons le vin et la limon­ade lorsqu’un cou­ple de vieil­lards s’in­stalle à la table voi­sine. Ils sor­tent d’un cab­i­net de médecin. La femme san­glote, l’homme par­le fort pour don­ner de la vie à la vie. Paraît le serveur, ils l’en­tre­ti­en­nent. Il part, la femme pleur­niche.
- Je n’en peux plus…
- Tu ne vas pas pleur­er!
- Je te dis que ça ne sert plus à rien.
- Ce morceau de cochon est excel­lent, prof­ite!
Le garçon reparaît. La femme lui demande des nou­velles de sa mère, de son fils. Sitôt par­ti, elle repousse couteau et fourchette, trem­ble et gémit. Lui mâche et hausse le ton. Plus tard, ils par­lent vite, au ras des assi­ettes, comme un cou­ple qui au fil des ans et de l’in­tim­ité, a inven­té sa pro­pre langue. Tan­dis que la femme se bat con­tre un diag­nos­tique, lui est venu manger et ne veut pas gâch­er son repas.