Si je devais avoir un seul projet pour l’avenir, ce serait d’apprendre à dormir. L’anxiété est un véritable handicap dans cet exercice. A Jérusalem, j’ai eu le pressentiment de ce que peut être une nuit sans souci et cela, avant même de plonger dans le sommeil: les voix qui sans relâche se disputent l’esprit retenant le corps du côté de la veille se sont tues. Est apparu une tache de lumière fine où il n’était plus question ni de corps ni d’esprit ni de voix. Cela seul existait, stable et promis à la nuit. L’heureuse expérience ne s’est pas reproduite. Samedi par exemple, alors que le sommeil n’avait été précédé d’aucun excès, je me suis réveillé toutes les dix minutes, terminant un rêve avant de plonger dans le suivant comme on lirait sous la férule d’un sadique de mediocre petites nouvelles, cela jusqu’à quatre heures et demie du matin, heure habituelle de l’insomnie. L’esprit s’engage alors dans un recensement exhaustifs des situations de la vie récente et future, et s’affole. Au milieu des images, souvenirs, ratiocinations, textes dont j’ècris ou reçois les premières phrases, ceci: mon paysage mental, site mort qu’animent à coups d’ailes les seuls oiseaux.