Mois : février 2011

Dans le bus pour Sukkothai, écoute d’une émis­sion de radio sur L’o­rig­ine du total­i­tarisme d’Han­nah Arendt. Pen­sée pré­cise que ne peux trans­met­tre le journalisme.

Au Pan­thip Plaza, super­marché des util­i­taires élec­tron­iques, un noir marchande. Il exige un logi­ciel ou un jeu, et le thäi s’ex­clame:
- J’ai!.
Il pian­ote sur le télé­phone portable, donne l’or­dre à des col­lègues en coulisse de lancer la la copie à par­tir de l’o­rig­i­nal — alors le noir esquisse un pas de danse et les paumes de mains dressées:
- Non, non, c’est pas ce que je voulais, attend… est-ce que tu aurais…?

Ecri­t­ure et lec­ture sont les medi­ums qui fix­ent la pen­sée. A l’u­ni­ver­sité je renonçais à pren­dre des notes, ain­si forçé de lire les textes de bout en bout.

Suite avec vue au 17ème étage du Shangri-La de Bangkok. Sous nos yeux le Chao Phraya que j’aime tant et son traf­fic de bateaux-bus, de pénich­es, de jon­ques, de “long-tails boat”. Au loin, le métro aérie et le flot des voitures sur le pont Tak­sim. Sur l’autre berge, un grat­te-ciel en con­struc­tion, le “riv­er build­ing”, soix­ante étages. Sur la façade noire, des ouvri­ers supen­dus tra­vail­lent au chalumeau. A droite, un bâti­ment-park­ing. Un jog­ger court d’é­tage en étage, arrivé au rez, remonte. Et des cours de ten­nis et des pan­neaux solaires sous lesquels se reposent les garçons d’étage.

Cha­cun tirait la corde à soi, l’un vers la droite, l’autre vers la gauche, mais l’homme qui tirait à droite était à son tour tiré dans des direc­tions con­traires par deux autres hommes et de même pour son adver­saire, et à leur tour les qua­tre hommes qui tiraient les deux pre­miers dans des direc­tions opposées…

Le gosse anglais que j’ai pris pour un autiste, dans l’île, n’é­tait peut-être que gâté. Un jour, son père déplie sur la table du restau­rant, au petit-déje­uner, une panoplie infor­ma­tique digne d’un courtier de Wall Street. Cher­chant der­rière ses lunettes le gosse, il lui donne un ordre que celui-ci trans­gresse. Alors le père s’écria: ce gosse est impos­si­ble! Sa femme, assise en face, répète l’or­dre. Même résul­tat. Aucun. Tous deux com­man­dent des frites, des glaces, des ham­burg­ers. Et les aban­don­nent dans l’assiette.

Chez des inter­locu­teurs, opin­ions qui sont la répéti­tion mécanique d’opin­ions pris­es dans la presse. Leur par­tic­u­lar­ité est de ne jamais avoir été pensées.

Au moment de choisir ma dis­ci­pline d’é­tude à l’u­ni­ver­sité, je m’in­scriv­is à dif­férents sémi­naires — agronomie, poli­tique, lit­téra­ture, philoso­phie. En lit­téra­ture mod­erne, je par­tic­i­pais à une lec­ture d’Ar­taud. Au bout d’un mois, le pro­fesseur nous com­man­da un exposé.
- Quel sera votre sujet, me dit-il.
- Dieu.
- Mmh… Prenez plutôt le début du texte de la page 190.

Toute pen­sée est vaine qui n’a pas mis d’abord l’au­teur à la ques­tion (Denis de Rougemont).

Dans un hamac, devant la mer, le restau­rant dans un cabane, à dix mètres, la bière, à portée de main, et le silence.