Mois : février 2011

Ren­dez-vous avec Aplo chez une pédi­a­tre. Péri­ode d’es­sai d’ad­min­is­tra­tion de Rétaline au terme de laque­lle, nous dit la dame, “vous n’au­rez d’autre choix que de con­tin­uer”. Elle soumet Aplo à une série de ques­tions. Il répond pos­i­tive­ment. Elle souligne le suc­cès du traite­ment et con­clut: “nous allons donc aug­menter la dose”. Je demande si un con­tre­coup est à crain­dre à la fin de la médica­men­ta­tion. “Aucun”. Sor­ti du cab­i­net, Olof­so me dit que la pédi­a­tre, lors d’une séance antérieure, a pré­cisé qu’on ne pou­vait cess­er brusque­ment la prise de Rétaline, qu’il fal­lait tenir compte d’une accou­tu­mance. A notre entrée dans le cab­i­net j’avais fait remar­qué à Aplo une col­lec­tion de fioles sous vit­re. Main­tenant nous quit­tons le cab­i­net et la pédi­a­tre s’ar­rête devant les fioles:
- Cest nou­veau, nous dit-elle.
- Ori­en­tal?
- Egyp­tien.
- C’est d’ac­tu­al­ité, dis-je.
La pédi­a­tre me regarde sans com­pren­dre. (Trente jours que la presse, la télévi­sion, les radios ne par­lent que des man­i­fes­ta­tions anti-Moubarak en Egypte).

Tu ne représen­teras pas ton Dieu — car alors il serait fini, com­pa­ra­ble et non-tran­scen­dant. Sauf à être artiste, capa­ble de faire vari­er à l’in­fi­ni le fini, capa­ble d’in­car­n­er l’in­fi­ni, la représen­ta­tion est anti-dynamique. La foi, assor­tie à l’ex­i­gence d’in­vis­i­bil­ité, vise comme objet de créa­tion un Dieu dont la forme et le con­tenu sont tou­jours différés.

Debout à 3h30. Tout noir. Pas l’aube tran­quille du grand cloître de la Char­treuse, lorsque je me lev­ais la nuit pour écouter le fontaine. A six heures les enfants qu’il faut réveiller dans leurs cham­bres. Mai­son froide. Bûch­es à enflam­mer, poêles à rem­plir. Faire entr­er le chat, rem­plir l’assi­ette, le faire sor­tir. L’or­di­na­teur affiche: émeutes en Egypte.

Change­ment. Heureux. Ou presque. Sere­in. Heureux d’être seul. Plus cette sen­sa­tion de poids. A ratrap­per sans cesse par l’acte, par la pen­sée, Gala. Du coup le jardin est plus grand et a per­du ses lim­ites, je vais pou­voir regarder au large et reposé, marcher où je le veux, quand je le veux, dans le monde proche.

De retour après un mois, je trou­ve la mai­son ouverte. Porte et fenêtre, tout est ouvert. Les chauffages, à fond. J’ap­pelle. Un ouvri­er descend. Le chauffag­iste. Maro­cain. Il veut me mon­tr­er son tra­vail. Les enfants ont faim. Moi aus­si. Il atten­dra. Nous prenons le goûter au jardin. J’aperçois l’ou­vri­er qui ges­tic­ule dans mon bureau. J’at­tendais d’avoir manger pour lui dire que le choix de l’emplacement du radi­a­teur, sous la baie vit­rée con­tre laque­lle j’écris, ne con­vient pas. J’ar­rête de manger, je monte. Plus tard, il me tend une boîte de cacao pub­lic­i­taire.
- J’ai ren­ver­sé mon café sur votre nappe, alors pour compenser…

Du bal­con du Thaï hotel de Kra­bi, je dis à Gala restée dans la cham­bre, “il pleut”. J’a­joute “l’af­faire de dix min­utes”. Deux jours plus tard, il pleut encore.

Roman, réc­it, nota­tion, inven­tion d’une sit­u­a­tion, rap­port d’un événe­ment, tra­vail de réflex­ion — si l’on veut des per­cées lit­téraires (non pas en lit­téra­ture), gen­res à combiner.

Ciel limpi­de, les pré-Alpes comme soulevées.

Le maire de Faoug me fai­sait des pho­to­copies de mon mémoire sur la méta­physique des substances.

Ce jardin sauvage, en fait une combe d’herbe entourée de pom­miers, près de Faoug. Je pas­sais à sa portée pen­dant les mois où je gar­dais les vach­es et j’en­vi­ais du haut du tracteur ceux qui pou­vaient s’y repos­er (il n’y avait per­son­ne). En fin de compte, retour­nant à la ville, sans m’y être attardé.