Elle est assise face à la rue, dans un bar du canal, devant une table basse chargée de boissons et de chaque côté, dans des fauteuils, un homme. Tous deux prévenants et désireux. Elle se tourne vers l’un, qui insiste mieux, parle plus fort que l’autre gesticule, occupe le terrain. Et puis il se lève pour se rendre aux toilettes et c’est au tour de l’autre, elle se tourne vers l’autre. Autant l’un est vif (celui qui s’est absenté), autant l’autre (celui qui est resté) est engoncé. L’un, petit, brun, méditerranéen, peut-être du Maroc, l’autre nordique, à mâchoire prognathe. Deux figures antoniques du mâle. L’un côté clan, consil de famille, virilité, fantaisie, l’autre côté foyer, ennui, travail, sécurité. Le manège dure. Le petit brun tient la distance, mais paraît s’essoufler. Je me demande qui va l’emporter; je me demande encore si, par dessus-tout, elle ne souhaite pas qu’aucun n’abandonne.