Mois : avril 2009

Faire de grandes choses est pos­si­ble, des choses lumineuses. Nul ne peut dire ce qu’elles sont et ce qu’elles sont ne compte pas, mais on sent qu’elles sont grandes et c’est leur lumière. Si on veut nom­mer ces choses, si on dit “j’ai saisi une tasse, grimper un escalier, ramass­er un cail­lou”, lumière et grandeur ren­trent dans la chose et la parent.

Der­rière chaque obsta­cle, un autre obsta­cle. On peut con­sid­ér­er que cela pren­dra fin et s’ef­forcer d’at­tein­dre le dernier obsta­cle pour le sur­mon­ter. Dans cette lutte, le rap­port à soi est per­du. On peut aus­si aban­don­ner, choisir la voie spir­ituelle. Le rap­port à soi est sauf, mais pas la vision de ce qu’est la société.

Hôtel du haut, la viet­nami­enne avec son bar à salades automa­tique (il s’ou­vre à 19h00) et le père cycliste qui me mon­tre ses cica­tri­ces, “ça c’est mon pied, mon tib­ia, ma moelle” et comble de chance, “vous per­me­t­tez?”, s’in­stalle à la table à côté un représen­tant de com­merce qui vend de la pein­ture au mini­um de plomb ou quelque autre liq­uide techonologique, qui en vend des mil­liers de litres à Mada­gas­car, “atten­tion, s’ils paient en avance!” et tout cela dur­era car la viet­nami­enne est seule pour servir la salle et elle a dis­paru en cuisine.

Ils firent de si longues vacances que le temps sor­tit des repères et le mer­cre­di, le same­di n’avaient plus de sens et à mesure que le temps pas­sait la notion de vacances se perdit, cela devint ennuyeux, il n’y avait ni lun­di ni fin de semaine, aus­si songèrent-ils à pren­dre des vacances, mais ils cher­chèrent en vain un jour pour les faire com­me­cer et l’essen­tiel de ce temps ennuyeux qu’ils vivaient pas­sait à cette recherche.

Retour à Lhôpi­tal le 10 jan­vi­er. Toi­lettes, murs, sols et poêle glacés. Je vais au bois. Rondins humides dans l’âtre. Ils crachent une fumée noire qui m’oblige à ouvrir en grand les fenêtres. Au réveil, enfon­cé dans des chaus­setes et des pulls, la cafetière coule et à la salle bains, l’aigu­ille des sec­on­des recule, mais c’est le jour et j’ap­porte mes bil­lets de banque au ban­quier pour pay­er la maison.

Il y a quelques années, de retour de Stre­sa, je passe le Got­thard et à Chip­pis m’ar­rête au café. Le week-end ce sont tenues des élec­tions fédérales. A la serveuse je demande:
- Alors, qui a gag­né?
- Je ne sais pas.

Il rêvait de tomber, mais il était déjà tombé et en était mort.

Vingt cor­re­spon­dants à qui j’adresse un mes­sage. Pas de réponse. Ce sont les vacances. Le jour de la ren­trée, les réponses.

Ile de Lampe­dusa, Ital­ie, lieu de tran­sit des immi­grés. Les dic­tatures africaines se ser­vent des déshérités comme d’une mon­naie d’échange, les cap­i­tal­istes le récla­ment pour leurs chantiers, les human­i­taires pour leur fonds de com­merce, l’ex­tême-droite pour illus­tr­er son thème, la tech­nocratie brux­el­loise pour four­bir ses rap­ports. Que ne coule-t-on cette tête de pont?

Au bout de la rue il n’y avait rien de plus mais c’é­tait le bout de la rue.