Guggenheim 3

Avec nos enfants, on fait sou­vent ce que l’on a fait avec nos par­ents. Et si ce que l’on a fait avec nos par­ents n’a pas de sens, on fait avec nos enfants ce qui n’a pas de sens.

Guggenheim 2

L’hiv­er 2017, après avoir remon­té la por­tion sud de Cen­tral Park, je me fai­sais une joie de mon­tr­er le Guggen­heim de New-York à Luv. Dans le grand hall cir­cu­laire, je m’aperçois que je n’ai jamais aimé ce musée. Que si l’on peut van­ter la prouesse archi­tec­turale, jamais le bâti­ment n’au­rait dû servir à expos­er des œuvres. Je n’en dis rien, paie une for­tune nos bil­lets et nous com­mençons de gravir les couloirs sinu­soï­daux. Je m’en­tends dire: “con­tin­uons, ça doit être l’ex­po­si­tion tem­po­raire”. Mais non, toutes les galeries de l’escar­got exposent ce jour-là une seule artiste, une Améri­caine ama­teur de cer­cles, de car­rés et de bâtons dans la plus tra­di­tion expéri­men­tale de l’art abstrait nais­sant (début XXème). Ce n’est que par­venus en haut de l’éd­i­fice — pour moi dépité — que nous décou­vrons, accrochée au fond d’une salle obscure, une toile de l’artiste alors ado­les­cente, une nature morte qui prou­ve qu’elle sait dessiner. 

Guggenheim

A l’en­trée du musée, je pousse la famille: “allez devant, je con­nais déjà !”. Le temps passe, mes têtes blondes, ma femme (qui n’est pas Gala mais X.) ne revi­en­nent pas. J’ attrape le vélo, fend les groupes assem­blés devant les œuvres, monte dans les étages, aperçois devant une toile l’écrivain OT, le crâne chauve, la peau malade, l’air d’un batra­cien. Et redescends et recom­mence. Pas trace des miens. A la troisième ten­ta­tive, je vais jusqu’au gre­nier du musée. Assis der­rière son bureau, un psy­ch­an­a­lyste explique d’un air navré à l’écrivain OT: “ils ne vous ont rien lais­sé”. Je demande: “Avez-vous vu ma famille?”. Le psy­ch­an­a­lyste dés­in­volte: “par­tis”. Je demande : “… quand?”. Avec la même dés­in­vol­ture : “Oh, il y a déjà plus d’une heure!”. 

Mouvement

Braire avec les ânes n’est pas com­pliqué surtout si le paysan tire sur la queue pour déclencher l’événement.

Art

L’art est indi­vidu­el, silen­cieux, ne laisse que de rares traces, de ce fait précieuses.

Chiffres et quantités 2

Dif­fi­cile d’é­val­uer com­bi­en les batailles absur­des déclenchées par les rap­ports de tra­vail et de société nous éloignent du cen­tre néces­saire de l’at­ten­tion. Or, elle seule per­met à l’homme de se con­stituer val­able­ment. Après huit mois à réa­gir, loin de toute explo­ration intime, je tente de retrou­ver le chemin. La nuit je fab­rique, comme je fais par­fois pour chas­s­er l’in­som­nie, des vers, tra­vail­lant autour d’un pre­mier venu: rude écorce des mau­vais cerveaux…

Culture

Cha­toiement dérisoire des pro­duc­tions collectives.

Gréement 2

Le ven­dre­di arrivent au vil­lage les citadins. Ils ouvrent les maisons, dressent la table au jardin, les enfants se répan­dent dans les rues. Cer­taines familles roulent plus de mil kilo­mètres pour prof­iter du silence et de la nature les same­di et dimanche. Aus­sitôt arrivés, ils com­men­cent des activ­ités, l’été baig­nade dans les riv­ières, cir­cuits à vélo, ran­don­nées, pael­las, à l’au­tomne cueil­lette de champignons. Lorsqu’ils se quit­tent le soir, ils fix­ent l’heure du ren­dez-vous le lende­main matin. Les enfants précè­dent les adultes, entrent dans les maisons, les pre­mier lev­és font le petit-déje­uner pour les autres, tout le jour et tout le week-end ils par­lent et jouent, ne cessent de par­ler et de jouer. Ils bail­lent mais ne sont pas fatigués. Il sont fatigués mais le cachent. Dimanche en début d’après-midi, hommes et femmes repren­nent la route, une semaine de tra­vail les attend. 

Outil

Pour la pra­tique d’un théâtre sans spec­ta­teur, privé de sa dimen­sion spécu­laire, voué à la recherche par le dialogue.

Poésie

Ce jeune poète avec qui j’avais fait alliance pour l’en­reg­istrement de dis­ques. Un duvet de poils sous le nez, le teint livide, habil­lé d’un cos­tume gris de ban­quier. Génial et fou. Il évi­tait de par­ler le pre­mier. Lorsque je demandais: “com­ment vas-tu?, il me répondait: “je me le demande”.