Ce soir, sur la place du village, j’ai passé une heure à gratter mon nouveau bus. Seul déparait un élément usé sur les bords : l’autocollant longiligne marquant de noir la bavette arrière du véhicule. Je renouais alors avec une histoire ancienne: canif en main je pense faire vite, mais les couches résistent, la surface est encollée, elle doit être nettoyée, il y faut de la patience, de la méthode, de la minutie, il faut s’acharner. Pour autant, je ne dédaigne pas ce genre de travail. Il contribue à améliorer les objets. Dans la transmission, ce qui vous est donné en mauvais état est restitué au monde en bon état. Une satisfaction. A quarante d’ans d’intervalle, je faisais de même avec mes planches de skate. L’acmé de ces efforts de conservation et d’entretien des choses eut lieu l’année 1979 à Fribourg. Tony Alva, la champion de Santa Monica commercialisa une planche de park peinte d’un logo façon Pollock. Une semaine durant je contemplais ma planche, soit le modèle précédent. Je résolus alors d’effacer sa décoration et de reproduire à l’identique le nouveau logo en me servant d’une ponceuse, d’une gouge, de six pots de peinture et de deux vernis.