Vol en bande des uns (le gouvernement); travail augmenté des autres (les pourvois); ralentissement fatal du travail (fatigue des dépouillés); frein à la prédation (exigence accrue); conséquences: frustration unanime et hostilité grandissante.
Routine
Demain le débit de l’Ara devrait enfin baisser. Evola en conclut par envie qu’il franchira le pont samedi matin ce qui permettra de se rejoindre à Puente pour acheter pain et viande, et retourner sur le terrain. Je gagne ainsi un jour de travail sur l’essai “Gouvernance et Gaming” dont j’avance les corrections à raison d’une heure le paragraphe.
Rock
Attitude fascinante des Daughters à la Maroquinerie de Paris en 2019. Tour de chant extrême de Alexis Marshall (vu en concert la même année à Madrid). Je ne trouve pour concurrencer son génie en scène que Ian Curtis (premières parutions de Joy Division) ou David Yow (quand The Jesus Lizards tournait l’Europe dans les années 1995).
Biscaye 2
Collines boiseuses, bêtes dans les vallons. Entourées d’habitations suicidaires, les usines plongent leurs cheminées dans le ciel. Les villages sont formées de maisons rangées aux toits bisques. Les héritiers (basques) des fondateurs (basques), désormais garantis du fruit du labeur circulent en voitures ripolinées. Quant à la langue, c’est celle des dieux du Kalevala, brutale et cassée, et terrible dans la bouche des petits. Les femmes vont sur le quai de l’Océan la chevelure jais façon casque, les faciès ovales et des yeux fondants. Leurs maris, autant de butors pour gravir les pentes. Tous azimuts, des produits frais gorgés de pluie et des poissons à demi-vivants. Il y a des parapluies aux coins des rues.
Zumayakarregui Kala 3
Je monte sur la planche, je glisse et je tombe. Pour cause, je n’ai pas ciré la surface. Pire, j’ai demandé au vendeur du mini longboard de racler la vieille cire (pour raison esthétique). La Lucernoise me prête son puck de sex-wax. Je retourne dans les vagues. Ah oui, ça va déjà mieux! Et puis l’eau est claire, le sable visible dans la profondeur, le soleil moins timide. A la fin de la séance, j’ai réussi quatre surfs. Encore dix ans de pratique et je devrais pouvoir dire : “je fais du surf”.
Zumayakarregui Kala 2
Ce matin vagues plus lourdes et moins chaotiques. L’eau est froide. Seul à porter une combinaison d’été, j’ai du bleu aux genoux. Je sors régulièrement de la mer pour me réchauffer, mais il pleut. Quand le soleil revient, un arc-en-ciel se forme, puis un autre arc-en-ciel. Le tonnerre gronde, l’orage se lève, les palmiers en pots tremblent, les arcs-en-ciels sont effacés. C’est à nouveau la pluie. Nous surfons maintenant une eau grise piquée de gouttes (enfin les autres, moi je nage et tombe, et nage et tombe). Après une heure de ce régime, j’ai l’impression d’avoir couru un marathon. Nuque, épaules, bras, les muscles sont douloureux. Je ramène le surf, je passe à la bière et au vin.
Zumayakarregui Kala
Qui est le nom d’une des rues de la baie de Zarautz. Notre appartement se trouve en face des anciennes douanes maritimes ou poissonnières; il est aujourd’hui reconverti dans l’absurde administratif avec personnel important et fanion de l’Europe. Pour le reste, quartier tranquille, propre, et même cossu. En cette période de l’année, pour partie fermé. Mais aussi cher, surtout quand on loue des jours de vacance. Le propriétaire — un ventripotent barbu et hilare qui me donne du “gamin!” — est reclus dans une chambre de bonne au coin de l’étage; nous disposons du reste de l’espace, cinq pièces traversantes avec cuisine et bar. Du balcon, l’ouverture sur la plage permet de juger de la force des vagues. Chaque matin, je sors le mini-longboard Bic du van, enfile la combinaison de néoprène acquise il y a trente ans dans la Nouvelle Galle du Sud et vais à la mer. Le premier jour, j’ai révisé sur un site de surf mon duck-diving, la figure qui consiste à plonger avec la planche sous la vague pour chercher le large. Dernière fois que j’ai entraîné la technique, j’étais en Australie, j’avais vingt-six ans. Persuadé de maîtriser la figure, je m’élance. De retour sur terre ferme, penaud, une Lucernoise (aussi débutante, mais moins naïve) me dit: “le duck-diving, ça ne marche pas avec les longboards, il faut passer par-dessus la vague”. Soulagé, je repars dans les rouleaux et constate que si je sais ma théorie (dans le salon, j’ai expliqué en maître les mouvements à Gala), j’ai tout oublié de la pratique. Cependant, je ne coule pas. Je finis par glisser sur quelques dizaines de mètres.