Intérêt renouvelé pour la coalition maffieuse, cette horreur. Confiscation des libertés élémentaires, annulation du droit de posséder et saisie des personnes, face aux opérations maffieuses de l’Etat maffieux la réaction est de jouer selon les mêmes règles.
Soria
Petite capitale, capitale rêvée. Déjà mon sentiment il y a trente ans, lorsque je passais mon été à enseigner l’anglais aux enfants. Deux rues piétonnes flanquées d’édifices historiques et de demeures anciennes que terminent en partie basse la rivière Duero en partie haute le splendide parc de l’Alameda de Cervantès. A bord d’un studio parfaitement dessiné, confortable, silencieux, moderne, logé dans les ruines d’un monastère, à deux pas du centre de la ville.
Soria-camping
Soria ce n’est nulle part, mais alors comment expliquer que les prix des hôtels soient prohibitifs ce soir? Samedi? Pas qu’un samedi dans l’année et ce ne sont pas les vacances! Nous installons le van dans le camping municipal. Orage. Gros orage. Gala a froid. Les voisins sont Hollandais, Allemands, Suisses. Interchangeables. A distinguer en fonction des chiens. Ils commandent au bar des mets lourds en anglais nous commandons en espagnol des mets légers (qui s’avèrent tout aussi lourds).
Soria-campagne
Dormi à la Casona Santa Coloma, dans un village de sept habitants, chez un Argentin. D’entrée (il est 18h00) il dit “la chambre n’est pas prête” et “les autorités exigent désormais toutes sortes de renseignements privés de la part des clients, mettez n’importe quoi, je m’occupe du reste!”. De la chambre, je vois la camionnette et l’infini. Au bout de l’infini, une colline. A son sommet Numance, ancien site celtibère. Monpère m’envoie des images d’Autriche (“tes amis”, écrit-il). Il pleut. Il roule en direction de Budapest. Sept heures qu’il pleut. J’envoie une image de la campagne prise depuis la fenêtre: un paradis. Le soir, un seul autre client dans la salle à manger, une Argentine qui écrit un guide sur les endroits reculés. Le lendemain, au petit-déjeuner, elle en parle aux paysans venus boire un alcool : ils sont gênés.
Etape
A Calatayud, ville petite, sans intérêt, où je suis venu, revenu, à vélo, en voiture, avec Gala, sans Gala et ce soir, une fois de plus avec Gala, parce que Calatayud est sur la route, qu’il y a un bon restaurant, qu’il y a un hôtel avec vue, une vue magnifique sur la Collégiale et le château de l’horloge et partout des cigognes installées dans des nids de branchage gros comme des fagots. Sous un soleil brûlant, entouré de chiens de compagnie à qui les propriétaires font la conversation, entre deux barres de locatifs, à la limite de la ville pour la discrétion, je fais mon programme de sport (équilibre, vitesse, force) puis nous déjeunons chez Escartin, sept plats et deux rouges du cru, le Baltazar Gracián (dont je dois être l’un des rares en ville à avoir lu l’œuvre) et le Langa (dont la cave trône en haut d’une montée roulée sur le vélo de voyage par quarante-deux degrés).
Alto de Lodares
Le truc c’est de chercher la station-service la moins visible, la mieux nichée, la plus intime. La différence sur le plein permet d’économiser l’équivalent d’un menu ou d’une tournée d’apéritif. Dis comme ça, la chose à l’air simple, mais il faut garder l’œil ouvert sur des centaines de kilomètres et analyser les panneaux perchés au fond des paysages. A Lodares, j’en trouve un derrière un petite cordillère. Edifice de tôle blanche dressé sur un terrain vague. Des semi-remorques à la manœuvre. Dans la cabine, une femme pompiste. Elle met ses gants, ouvre mon réservoir, fait couler le diesel. Le pied sur mon pneu Climate Cross elle demande:
-Sont vrais ces Michelin?
-Vrais? Oui bien sûr! Parce qu’il y en a des faux?
-Et comment M’sieur, y’a des faux en tout, les vôtres ils doivent coûter dans les 100 balles pièce eh bien on peut en trouver pour huit balles, de la copie chinoise.
A ce moment-là, un routier descend de son camion, il lance à la pompiste:
-Hé María, où as tu mis ton mari?
-Il y a longtemps que je l’ai envoyé promener! Non mais!
Elle se remet à taper du pied sur mon pneu:
-C’est comme pour les gosses, on en fait trois ou quatre, ou même cinq, et il y en a toujours un qui est une copie des autres et celui-là, il marche moins bien, il a pas de qualité, on peut rien en faire.
Puis elle se lance en dialecte dans un discours sur les vertus des vrais enfants et des faux adultes qui me fait rire aux larmes bien que n’y comprenne goutte.