En route pour Genève où j’arrive la nuit tombée. Passé la frontière en direction de la France. L’hôtel-chalet sur le parking de supermarché désormais entièrement géré par du personnel africain. Gala s’est résolue à m’apporter la bière suisse que je demandais, elle achète du vin à la réception, nous montons en chambre. Le décor est celui de 2021, j’étais alors expulsé de ma propre entreprise, voiture confisquée, famille sur le dos, ce soir l’ambiance est meilleure, elle est excellente. Le matin, c’est samedi, achats de victuailles dans cette atmosphère misérable de ville frontière de Haute-Savoie, mais il s’agit d’économiser sur les prix des Suisses avant de partir en train pour Neuchâtel où je retrouverai Luv dans son studio. Auparavant, sous une pluie battante, dans la vielle-ville, pour rencontrer Marc Mettler dans sa cave librairie du Cabinet d’amateur. Conversation de deux heures, autour de rien, peut-être faut-il d’abord faire le point sur ce que nous sommes avant de s’embarquer sur des sujets littéraires ou philosophiques (je n’ai vu Marc qu’une fois, il y a vingt ans, lorsque je donnais dans sa librairie lecture des Trois divagations sur le Mont-Arto). Je repars sous la pluie avec les œuvres complètes d’Ivan Illich et un volume de Max Jacob. A dix-huit heures, je retrouve Luv à la gare, elle arrive de Genève où ses amies d’enfance recevaient en cérémonie leur diplôme universitaire. Nous faisons le plein de bière, nous installons dans son studio, parlons et parlons encore quand soudain Luv fait: “papa, il est six heures du matin!”.