Longues nuits, longues heures à boire, longues sorties à vélo, sur les routes de montagne odorantes et désertes. Gravissant le col côté français, j’encourage un pèlerin muni d’un bâton de berger. La barbe carrée et le crâne nu, son poncho ruisselle de pluie. Tandis que je sue les bras sur le guidon, j’entends l’écho de ses souliers. Plus haut, c’est un étrange troupeau de moutons. Les animaux broutent le pré en formant un cercle régulier. Il sont nombreux et voraces. Le cercle grandit. Avant de disparaître dans un lacet je me retourne, le cercle a encore grandi. Aux douanes, bâtisses abandonnées, règlements peints, ni drapeau français ni drapeau espagnol, — je bascule sur la station de ski: remonte-pentes aux sillons terreux, véhicules de chasseurs, pluie fine. Et des casernes, elles aussi abandonnées. Dire que les gens continuent d’affluer vers les villes. Pourvu qu’ils ne reviennent jamais.